L’or fascine… pour le meilleur et le pire!

Affiche de l'exposition L'Or des Amériques. Museum nationale d'Histoire naturelle, Paris, 2009 (c) MNHNL’Or des Amériques

Jusqu’au 11 janvier 2010

[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-OR-DES-AMERIQUES-ORAME.htm]

Museum national d’Histoire naturelle, Galerie de Géologie et de Minéralogie, 36, rue Geoffroy Saint-Hilaire 75005, 8€

La fièvre de l’or, des civilisations précolombiennes jusqu’à nos jours, a façonné l’histoire du continent américain. L’exposition, présentée au Museum national d’Histoire naturelle, couvre tous les aspects de cette conquête de l’or, désastreuse sur le plan humain et écologique. Mais génératrice de la découverte de nouveaux territoires et acteur essentiel de l’économie mondiale.

Particulièrement exhaustive, « L’Or des Amériques » aborde à travers  six thématiques la nature exceptionnelle de l’or – matière noble et rare – qui a mené à la conquête de l’Amérique latine et de la côte Ouest des Etats-Unis. L’exposition se prolonge jusqu’à l’extraction de l’or en Guyane française et ses applications contemporaines dans la vie quotidienne. Des dents en or aux puces électroniques. Sans oublier les réserves bancaires de lingots d’or et, bien sûr, la joaillerie!

Or natif, jaune, de forme lamellaire sur une gangue de quartz compact (c) Louis-Dominique Bayle / MNHNORIGINES DE L’OR

Si l’or est présent dans la croûte terrestre,elle l’est dans une proportion moindre d’environ 30 fois  celle de l’argent et près de 22.000 fois celle du cuivre. Depuis les origines des temps, 160.000 tonnes ont été extraites du sol – à peine de quoi remplir la pyramide du Louvre.

Les mouvements des plaques tectoniques révèlent la présence concentrée d’or. Sur la côte ouest américaine, la plaque océanique s’enfonce sous le continent, entraînant ses minerais vers les profondeurs plus chaudes. La matière en fusion imprègne la roche et forme des chambres magmatiques. Les métaux combinés à l’eau remontent à la surface. Refroidis par l’ascension, les cristaux d’or s’accumulent. Sous forme géométrique s’ils sont assez d’espace ou lamellaire s’ils sont comprimés par les anfractuosités de la roche.

Ornement frontal, Mochica, Pérou. 200 av. J.-C. - 600 ap. J.-C. Or martelé, argent et cuivre avec traces de cinabre rouge. Le visage central porte un couvre-chef en forme de demi-lune et est entouré de deux jaguars au corps dentelé. La figure d'une divinité mi-homme mi-félin domine en effet la hiérarchie religieuse Mochica (c) Museo arqueologico Rafael Larco Herrera, Lima, PérouL’OR DES ATZEQUES

Les civilisations précolombiennes (plus de 2000 ans avant J.-C.), bien que de cultures différentes, se rejoignent dans leur croyance en la puissance religieuse de l’or qu’ils associent à l’astre solaire.

Pensant que l’or était le fruit de la mère nourricière (Pachamana) et du dieu mâle solaire (Inti), les mineurs des Andes organisaient des cérémonies pour assurer la fertilité de la terre.

Les métallurgistes péruviens privilégient le martelage et la production de grandes feuilles d’or, qui seront transformées en divers objets. Ceux de Colombie et d’Equateur préfèrent la technique de la cire perdue, qui permet de créer des objets en or massif, de plus petite taille. Pour cela, ils utilisent un moule de céramique épouse une forme en cire sculptée. En fondant, la cire crée un vide qui sert de réceptacle à l’or liquide. Le moule est brisé une fois que l’or est refroidi.

Il y a 1.500 ans, les métallurgistes d’Amérique centrale et latine ont mis au point une technique pour fabriquer des objets principalement en cuivre, conservant néanmoins l’aspect de l’or pur. Cet alliage, nommé tumbaga, a dupé les Espagnols. Ceux-ci, après avoir conquit la terre des Indiens, ont réagi violemment à leur déception, en les asservissant pour exploiter les mines d’or. Lorsque la population fut décimée, les Espagnols firent venir des esclaves africains. Oui, il n’est pas bon être un touriste espagnol dans cette exposition…Les mots des cartels à l’encontre des conquistadors du XVe siècle ne relèvent pas de la langue de bois!

Souhaitant profiter de l'effervescence économique engendrée par la ruée vers l'or, Henry Wells et William G. Fargo mettent sur pied en 1852 une compagnie assurant le transport par diligence de courrier, de passagers et de devises... Le service est inévitablement la cible de nombreuses attaques de bandits. Le plus célèbre hors-la-loi, Black Bart aurait pratiqué 28 assauts contre les diligences de la Wells Fargo (c) Collection Petra et Greg MartinLA CONQUETE DE L’OUEST AMERICAIN

La ruée vers la Californie date de 1848. Déclenchée pour des raisons politiques par les Etats-Unis pour reconquérir un territoire mexicain, la conquête de l’Ouest fonde quelques fortunes légendaires et demeure un mythe fondateur de l’histoire du pays.

Trois routes principales mènent en Californie. La route de Panama utilisée par les notables, fonctionnaires, militaires et gens fortunés. La route maritime du Cap Horn suivie par les prospecteurs venus d’Europe. Quant aux habitants du Middle West américains, ils utilisent la piste de l’Oregon pour s’installer en famille.

Pépites d'or de Californie, seconde moitié du XIXe siècle (c) Collection Petra et Greg MartinEn 1848, 4.000 orpailleurs sont enregistrés dans les divers sites de prospection californiens. Un an plus tard, leur nombre a été multiplié par dix. En 1850, ils sont 60.000 et en 1860, plus de 100.000.
Les 30.000 immigrants français – ouvriers au chômage, anciens révolutionnaires de 1848 indésirables, nobles endettés, aventuriers – sont surnommés par les anglophones les Keskidees – « Qu’est-ce qu’ils disent »!

Le 17 août 1896, George Carmack découvre de l'or dans le ruisseau Bonanza, affluent de la rivière Klondike, à la frontière du Canada et de l'Alaska. Ici, le sol doit être dégelé avant de pouvoir être attaqué à la pioche (c) B.L. SingleyAprès la Californie, les orpailleurs doivent monter plus au nord jusqu’à la frontière du Canada et de l’Alaska. Dans des conditions périlleuses, ils creusent des blocs de roche gelée. Les laissés pour compte sont bien plus nombreux que les fortunés et les dégâts environnementaux sont sans précédent. La cyanuration pour extraire l’or du minerai broyé ou l’amalgame avec le mercure pour récupérer les particules ne sont pas sans risques de fuites de produits toxiques, contaminant ruisseaux, rivières, eau souterraines, et par conséquent toute la chaîne alimentaire.

Et, pourtant, la fièvre de l’or perdure. Si l’extraction industrielle s’est accompagnée de règles de bonne conduite, les compagnies ne sont pas nécessairement contrôlées, ni sanctionnées et les orpailleurs clandestins, comme en Guyane française, continuent de recourir au mercure. Or, une absorption importante de mercure par l’homme peut entraîner des troubles nerveux et des malformations, particulièrement chez la femme enceinte et l’enfant. Par ailleurs, l’arrivée de chercheurs d’or dans une région entraîne chez les populations autochtones des problèmes d’alcoolisme, de prostition, de violence, l’apparition de nouvelles maladies, etc..

L’OR DE DEMAIN

(c) P. Lafaite / MNHND’où l’image souvent négative de l’exploitation de l’or. Pourtant, les applications dans le domaine médical et technologique (télécommunications et information) ne sont pas négligeables.

Appliqué sur les satellites, les vaisseaux spatiaux ou pulvérisé sur les visières des casques, l’or protège des rayons solaires grâce à son pouvoir réflecteur. Des recherches sont actuellement menées pour savoir si les fils d’or pourraient protéger la peau des rayons ultra-violets du soleil.

Dans le domaine monétaire, l’or est une valeur refuge. Depuis le 11 septembre 2001, le prix de l’or s’avère un précieux thermomètre de la température économique et sociale.

Mais c’est la joaillerie qui utilise les 3/4 de l’or extrait chaque année. Le reste est partagé équitablement entre les transactions financières et les usages technologiques voire alimentaires. En effet, l’or à petite dose est comestible!

Une exposition familiale qui intéresse autant par son aspect scientifique, qu’historique et écologique.

Pour marque-pages : Permaliens.

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