Voyage dans le cristal

Jusqu’au 14 janvier 2024

#VoyageDansLeCristal @museecluny

Musée de Cluny, 28 rue du Sommerard, Paris 5e

Le musée national du Moyen-Âge (musée de Cluny) propose un voyage à travers le cristal de roche, dont la transparence a fasciné toutes les civilisations. Des plus anciennes à nos jours.

Aphrodite accroupie, Ier siècle av. J.-C. Quartz © The J. Paul Getty Museum, Villa Collection, Malibu

À l’image de ses facettes diffractant la lumière, l’exposition est divisée en deux parties, qui se subdivisent en six petites sections. Sa transparence appelle à la spiritualité, à l’immatériel, alors qu’il est matière. Les objets liturgiques et reliquaires lui prisent son symbole de pureté. Il est également utilisé pour la vaisselle de luxe et les objets décoratifs dont les bijoux.

Ce choix artistique est le fil rouge de l’exposition, dont le titre est emprunté au roman de G. Sand, Laura, Voyage dans le cristal (1864). Comme les personnages dans l’histoire, le public est invité à ressentir l’infiniment petit et l’infiniment grand.

Reliquaire en cristal de roche, Cologne, vers 1200. Cuivre doré, filigrannes d’or, gemmes, quartz. Cologne, Museum Schnütgen © Photo : Stephan Kube/SQB

Dès l’Antiquité, les scientifiques cherchent à sonder les mystères des formes cristallines. C’est Strabon, au Ier siècle avant notre ère qui parle le premier de krystallos (« glace » en grec ancien), pensant que le cristal était de l’eau gelée. Douze siècles plus tard en Occident, le terme quartz désigne tous les types de cristaux. Au XVIe siècle, le savant Georgius Agricola réduit sa définition à la silice pure.

Biface. Cristal de roche. Paléolithique moyen – Moustérien © RMN-Grand Palais (musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye) / Loïc Hamon

Le quartz hyalin, c’est à dire transparent, désigne spécifiquement le cristal de roche. On en trouve partout sur la Terre et existe sous différentes formes dont six exemplaires naturels sont présentés ici, en provenance du Brésil, des Alpes ou de Madagascar.


Reliquaire figurant le prophète Philon d’Alexandrie, vers 1390. Argent partiellement doré, quartz © Hohes Domkapitel der Kathedralkirche St. Paulus, Münster © Stephan Kube, Greven

Le quartz se taille par percussion directe ou indirecte. Il peut aussi être poli et percé. Il est très utilisé en Orient. En Mésopotamie, on le retrouve pour fabriquer des outils et des lames sacrées. Chez les Égyptiens, il est incrusté dans des objets de luxe pour intensifier le regard. Si Bagdad et Le Caire sont deux centres importants de production cristalline, la découverte en 2005 d’un atelier lapidaire médiéval à Cologne témoigne d’une production également européenne. En Occident comme en Orient, le quartz sert de base à un bestiaire médiéval, autour de la figure du lion.


Représentation de crâne humain, XIXe siècle. Cristal de roche © Paris, musée du quai Branly – Jacques Chirac, Dist. RMN-Grand Palais / Patrick Gries / Valérie Torre

Son utilisation décroît progressivement avant de revenir à la mode au XXe siècle, grâce à Jean Vendome qui met en valeur le quartz rutile (à effet de paillettes). Le critique Maurice Raynal qualifie les oeuvres de P. Picasso et G. Braque de « cubisme cristal » pour souligner l’importance de la structure géométrique dans leur représentation du monde. J. Metzinger et J. Gris en théorisent les principes. Nombreux sont les artistes marqués par l’exposition au musée d’Ethnographie du Trocadéro à Paris d’un crâne en cristal. Dont Giacometti, qui lui même influencera plus tard D. Hirst.


Patrick Neu, Danse macabre, 2023. Cristal de roche. Collection de l’artiste © Patrick Neu. Photo : musée de Cluny – musée national du Moyen Âge

Les oeuvres de Patrice Neu clôturent le parcours (salle 22 du musée). Né en Lorraine (1963), région du verre et du cristal de plomb, l’artiste réalise des verres noircis à la fumée, un crâne en cristal de plomb noir et une Danse macabre : la Vanité (évocation de l’éphémère) est sculptée sur une pierre dure qui incarne le temps immémorial de la Terre.

Depuis sa rénovation, le parcours des expositions temporaires (dans le frigidarium, au sous-sol), à l’image du musée, régénère notre intérêt pour l’ère médiévale. Sur le fond comme sur la forme, le parcours est captivant.

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