La face cachée de Erwitt et Doisneau (I)

Elliott Erwitt. New York City, USA. 1955 (c) Elliott Erwitt / Magnum PhotosElliott Erwitt

Paris
Jusqu’au 13 mars 2010
Magnum Gallery, 13, rue de l’Abbaye 75006, Entrée libre

Personal Best [Le Meilleur de moi-même]
Jusqu’au 04 avril 2010

Maison Européenne de la Photogaphie
, 5/7 rue de Fourcy 75004, 6,50€

On connaît surtout de ces deux photographes leurs clichés humanistes, d’un Paris poétique, où l’anecdocte inattendue prête à sourire. Pourtant, l’oeuvre d’Elliott Erwitt (né en 1928 à Paris) et de Robert Doisneau (1912-1994), tous deux membres de l’Agence Magnum Photos, se révèle plus complexe et tragique qu’elles ne le laissent voir.

Elliott Erwitt, exposé simultanément à la Maison Européenne de la Photographie et dans la récente Magnum Gallery du VIe arrondissement parisien, possède un esprit vif, prompte à la répartie et non dénué d’ironie. A la fameuse question de savoir comment il travaille, il répond systématiquement: « Vous mettez le film dans l’appareil »!

Son enfance a été chaotique, fruit d’un déracinement continuel. Ses parents russes fuient la persécution contre les aristocrates et émigrent en Italie. Mais les lois de Mussolini les obligent à quitter le pays – le père est juif – pour la France puis l’Amérique. C’est ainsi qu’Elliott, bien que né à Paris, a la nationalité américaine. La famille vivra à New York avant de s’installer à Los Angeles.

Elliott Erwitt travaille très tôt dans un laboratoire commercial, où il développe des tirages « signés » pour les fans de stars de cinéma. A New York, il rencontre l’un des fondateurs de Magnum, Robert Capa. Mais aussi, Edward Steichen et Roy Strycker. Tous sont impressionnés par son talent et le prennent sous leurs ailes.
« La plupart d’entre nous travaillait pour gagner sa vie: nous ne pensions pas que ce que nous faisions aurait une valeur pour le marché de l’art ».

En 1949, il retourne en Europe. « Paris était pauvre et plein d’odeurs et de bien intéressante qu’aujourd’hui », confie-t-il.

De retour aux Etats-Unis, il collabore à la revue Life et participe à la célèbre exposition « The Family of Man », au Museum d’Art Moderne de New York (1955). Depuis plus de cinquante ans, ses livres, ses reportages photographiques, ses illustrations et ses publicités apparaissent dans les publications du monde entier.

A partir des années 70, Elliott Erwitt commence à tourner des films, puis des programmes de télévision comiques et satiriques pour la chaîne Home Box Office.

L’exposition de la MEP met en valeur des clichés au ton mélancolique. « Certaines personnes disent que mes photos sont tristes, d’autres les trouvent drôles. Drôlerie et tristesse, c’est un peu la même chose, non? ». Un parfait exemple de cette ambivalence est cette photographie d’un petit garçon noir, posant tout sourire, un pistolet contre la tempe (Pittsburgh, Pennsylvanie, USA, 1950).

A l’instar de la photographie de Kennedy lors de la Convention démocratique de 1960, fumant, plein de confiance dans le futur. Trois ans plus tard, Erwitt réalise un close-up de sa veuve Jacqueline, derrière le drapeau américain, brisée.

Elliott Erwitt. North Carolina, USA. 1950 (c) Elliott Erwitt / Magnum PhotosOu encore cette photographie de 1950, qui illustre les fontaines de la ségrégation en Caroline du Nord. Mais c’était presque à l’insu du photographe, qui n’imaginait pas s’engager contre l’injustice sociale. Pourtant, le choc draîné par la photo a été utilisé comme une motivation pour le changement puis plus tard comme souvenirs des mauvais jours.

« Ce sont juste des choses que vous voyez. Pas besoin de chercher quelque chose. Tout est là », affirme-t-il placidement?
Sauf quand il s’agit de l’effondrement du World Trade Center. « Je n’ai pas voulu photographier cela. Je suis allé à la banque du sang à la place. »

D’autres photographies, comme New York (1954), qui représente deux jambes humaines entourées de deux paires de pattes canines, font preuve de plus de légèreté.
Comme disait Doisneau: « Dans les images d’Elliott Erwitt comme dans les films de Chaplin, chacun peut trouver son plaisir. A quel titre et de quel droit limiterais-je ce plaisir? Il serait ridicule de tenter une pesante explication de cet humour graphique vif comme un clin d’oeil ».

De l’humour certes, mais toujours teinté d’un soupçon de mordant, non?

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4 réponses à La face cachée de Erwitt et Doisneau (I)

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  4. Roro dit :

    Bonjour,
    Juste une info : Robert Doisneau n’a jamais été membre de l’agence Magnum. Rapho par contre, oui.
    Salutations

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