Rituels pour un nouveau monde
Jusqu’au 7 mai 2023
Lafayettes Anticipations, 9 rue du Plâtre, Paris 4e
Entrée libre et gratuite.
Avec Agnes Gryczkowska comme commissaire invitée, Lafayette Anticipations s’inspire de la mouvance ambiante : réinventer des rituels du passé, païens ou divins, individuels ou collectifs, pour forger une puissance sacrée et nous offrir un nouveau spiritisme face à un monde abîmé, qui se doit se réinventer.
À partir des mots du poète anglais William Blake « To see a World in a Grain of Sand / And a Heaven in a Wild Flower / Hold Infinity in the palm of your had / And Eternity in an hour », les oeuvres sélectionnées invitent le spectateur à méditer, à être dans l’instant présent, pour apprendre à dépasser l’esprit profane et matériel de nos sociétés de consommation.
L’oeuvre phare qui introduit ce nouvel état d’esprit est celui de l’Africaine du Sud, Bianca Bondi (née en 1986, à Johannesburg). Beltane Oracle (2022-2023) évoque un jardin japonais avec son sable immaculé, ses petits mirages d’eau sacrée, composée d’un solvant et de lait maternel [l’artiste allaite actuellement son premier enfant], et des talismans de protection (coquillages et premiers pétales de printemps). La composition est déstructurée par l’élancement de faux morceaux d’acacia brûlés tels des bâtons géants de Palo Santo. L’ensemble évoque la tradition celtique ancestrale de Beltane, festival du premier mai, qui marquait la fin des jours sombres et le renouveau apporté par le printemps.
Autour de cette installation centrale, on peut admirer un manuscrit enluminé de l’abbesse Hildegard von Bingen (Liber scivias, vers 1151-1152), des sculptures en marbre datant du 3e siècle avant J.-C.
Ou encore des statuettes Dogon prises dans un étau de résine ; une oeuvre conçue par Matthew Angelo Harrison (né en 1989, à Detroit) qui fait référence à la colonisation, au contrôle des musées occidentaux sur les oeuvres d’art, et à l’industrialisation. L’artiste qui était un ancien salarié de Ford – le plus gros employeur d’Africains-Américains dans les 1920 et 1930 -, confronte l’objet magique à la répétition du geste mécanique de l’ouvrier, en utilisant la résine noire, marque de la fabrique automobile.
Non loin, Jeanne Vicerial (née en 1991, L’Isle-sur-la-Sorgue) présente une impressionnante reconstitution de gisantes royales. Près de cinq mille heures de travail ont été nécessaires pour tisser et mouler l’anatomie des reines de France enterrées dans la Basilique de Saint-Denis. Tels des totems mystiques, ces sculptures drapées de fils noirs forment une force obscure de contre-pouvoir.
Un art contemporain qui fait sens en reliant avec brio passé et présent.
À voir avant ou après une dégustation des excellents cookies du nouveau café-restaurant Mātēr !