Picasso

Obstinément méditerranéen

Jusqu’au 6 octobre 2019

Musée Picasso Paris, 5 rue de Thorigny, Paris 3e

Le musée Picasso Paris met en perspective la culture du bassin méditerranéen comme source d’inspiration de Picasso. De sa ville natale, Malaga (1881), à sa dernière demeure à Mougins (1973), dans le sud-est de la France. Pays où il a vécu et ceux qu’il a rêvés.

Pablo Picasso, La Baie de Cannes. Cannes, 19 avril 1958 – 9 juin 1958
Huile sur toile. Musée national Picasso-Paris
RMN-Grand Palais / Mathieu Rabeau
© Succession Picasso 2019

Cette exposition s’inscrit dans le cadre de la manifestation « Picasso-Méditerranée » qui se déroule simultanément dans dix pays méditerranéens et s’achèvera à l’automne 2019 au Liban et en Turquie.

Picasso n’a pas tant voyagé en Méditerranée qu’il a surtout reçu de nombreuses cartes postales et s’est cultivé dans les musées, notamment au Prado, à Madrid, et au musée du Louvre, à Paris.

Le parcours débute par LE chef-d’oeuvre de l’exposition, selon Laurent Le Bon (président du musée Picasso Paris), La Flûte de Pan (Antibes, été 1923), aux lignes épurées et à la construction géométrique, avec entre deux pans de mur, la ligne d’horizon formée par la mer. L’oeuvre est mise en écho avec Faunes et chèvre (Cannes, novembre 1959), qui souligne des dunes de sables devant un ciel bleu ou une mer (cf. image tweetée !). La ligne des dunes me fait plutôt penser au profil de l’artiste allongé sur le sable, dans le sens opposé de celui pris par Dora Maar à Mougins !

Pablo Picasso, Etudes de barque [Cadaquès, été 1910].
Encre sur papier
Musée national Picasso-Paris ©
RMN-Grand Palais / Thierry Le Mage
© Succession Picasso 2019

On découvre ensuite des paysages peints de l’Espagne de jeunesse de Picasso (Malaga, Barcelone), mis en contrepoint de photographies inédites d’époque témoignant de l’attrait de l’artiste pour la mer.

En 1917, petite parenthèse en dehors des frontières : Picasso se rend deux mois en Italie où il rencontre sa première épouse, Olga Khokhlova, danseuse des Ballets ruses. Il s’imprègne du folklore italien mêlé au classicisme gréco-romain.

La présentation de petits bronzes antiques collectionnés par Picasso témoigne de son intérêt pour la culture hispanique dans son ensemble – art ibérique, maîtres espagnols découverts au Prado, costumes traditionnels, flamenco et corrida.

Si Picasso habite à Paris à partir de la fin des années 1910, il se rend souvent dans le sud de la France pour y travailler ou retrouver des amis. En 1946, il quitte définitivement la capitale. D’abord pour le Château Grimaldi à Antibes, accompagné de Françoise Gilot, sa troisième compagne (Dora Maar était la seconde, cf expo au Centre Pompidou, dont l’article sera publié dans 4 jours). L’artiste crée des scènes méditerranéennes autour du thème de la mer : Ulysse et les sirènes, faunes musiciens, pêcheurs et mangeurs d’oursins.

Pablo Picasso, Tomette découpée et décorée en forme de chouette.
Cannes-Vallauris, 16 mars 1957
Terre rouge chamottée, décor aux engobes et incisions.
Musée national Picasso-Paris
RMN-Grand Palais / Béatrice Hatala © Succession Picasso 2019

Deux ans plus tard, il s’installe à Vallauris, village de potiers. Il débute une intense production de céramiques aux formes de chèvres, chouettes, poissons, nymphes, réalisant ainsi plus de quatre mille oeuvres. Picasso devient très médiatisé.

« C’est là que se construit le mythe de Picasso, toujours bronzé, portant la marinière et un éternel maillot de bain », commente Emilie Bouvard (conservatrice du patrimoine, Musée national Picasso-Paris), co-commissaire de l’exposition.

En 1955, Picasso quitte Vallauris pour la villa La Californie avec sa quatrième compagne, Jacqueline Roque. Le salon devient l’atelier de l’artiste, où s’accumulent toiles, sculptures, objets personnels. Comme en témoignent les photographies de l’américain David Douglas Duncan, qui partage le quotidien du couple entre 1956 et 1957.

Enfin, Picasso acquiert le château de Vauvenargues, près d’Aix-en-Provence, sur le flanc de la montagne Sainte-Victoire, chère à Paul Cézanne (1958) puis le mas Notre-Dame-de-Vie à Mougins, où il demeure jusqu’à sa mort (8 avril 1973). Le paysage méditerranéen est analysé entre La Mer à l’Estaque de Cézanne, le papier découpé en forme de feuillage luxuriant de Matisse et les paysages aux palmiers sous un soleil torride de Picasso.

Pablo Picasso, Vieil homme assis.
Mougins, 26 septembre 1970 -14 novembre 1971. Huile sur toile
Musée national Picasso-Paris ©
RMN-Grand Palais / Mathieu Rabeau
© Succession Picasso 2019

La dernière salle présente une confrontation entre Le Vieil Homme assis de Picasso, autoportrait de fin de vie de l’artiste, alors âgé de 91 ans. « Les couleurs crépusculaires évoquent Van Gogh », commente Camille Frasca (chargée de mission au Musée national Picasso-Paris, cheffe du projet « Picasso-Méditerranée »), co-commissaire de l’exposition. « Le chapeau comme le fauteuil d’extérieur font figures d’attributs méditerranéens », complète-t-elle.

Face à cette toile, l’artiste français Jean-Christophe Norman, qui a parcouru sept lieux fréquentés par Picasso (Marseille, Nice, Paris, Rome, Barcelone, Madrid, Malaga) et a écrit au sol à la craie blanche des passages de la biographie de l’historien Pierre Daix La Vie de peintre de Pablo Picasso, expose Terres à tierra (2018). Des carreaux en céramique sont assemblés pour former une ligne d’horizon dans les couleurs jaune, ocre et vert – écho aux teintes du Vieil homme assis qui semble contempler la fin de sa vie et de son oeuvre.

Une exposition composée d’oeuvres inédites issues des archives privées du musée Picasso ; une progression du parcours bien menée, alternant cimaises chargées et d’autres avec moins d’oeuvres ; des oeuvres originales et d’autres numérisées. L’ensemble est très intéressant !

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