La « mariée des Indes »

Lucknow, une cour royale en Inde (XVIIIe-XIXe siècle)

Jusqu’au 11 juillet 2011

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Musée Guimet, 6 place d’Iéna 75016

Surnommée la « mariée des Indes », Lucknow a attiré une intelligentsia indienne et européenne qui a porté la ville au faîte de sa splendeur. Le musée Guimet reprend l’intégralité de l’exposition conçue par le Los Angeles County Museum, « India’s fabled city: the art of courtly Lucknow« . Et illustre comment cette capitale provinciale a su dépasser Delhi et Faizabad par son rayonnement artistique. Mais également par l’empreinte historique qu’elle a laissée au siècle de l’Inde coloniale.

Elue capitale de l’Awadh (Inde du Nord) en 1775, Lucknow a drainé artistes et poètes lorsque Delhi est envahie par les soldats du souverain iranien Nadir Shah en 1739. Sa mise à sac entraîne la dislocation de l’Empire moghole en Inde.
Parallèlement, l’autorité britannique s’affirme. Nombre de voyageurs européens, commerciaux et représentants politiques, charmés par Lucknow, s’y installent.

La rencontre des nawabs (littéralement adjoint ou vice-régent) et des Européens, favorisent l’émergence d’une culture unique. Les uns s’entichant des coutumes locales, les autres s’inspirant de l’architecture européenne (villas et demeures des campagnes anglaises) et collectionnant les objets européens. Comme le reflètent les gravures et peintures exécutés par des artistes britanniques essentiellement, tels William Hodges, Thomas & William Daniell, Tilly Kettle et Robert Home.

Cette esthétique se traduit dans les arts décoratifs par un répertoire floral exubérant (iris stylisés, lys, fleurs de pavot, roses). Réels ou fantaisistes, les motifs végétaux s’incarnent en de complexes rinceaux ou se déploient sur des branchages noueux. Ils sont complétés par un décor animalier (oiseaux) et des vignettes architecturales rappelant les motifs d’inspiration chinoise, alors populaires en Europe.

La ville connaît cependant un drame historique. Entre 1757 et 1758, la begum (titre d’honneur des princesses indiennes) Hazrat Mahal, quatrième épouse du roi déchu, mène une mutinerie contre le pouvoir colonial incarné par la domination de la Compagnie anglaise des Indes Orientales. Cette révolte des Cipayes est considérée comme la première guerre d’indépendance de l’Inde, quatre vingt-dix ans avant que Ganghi ne mène le combat. Loin d’être pacifique, ce soulèvement a pris en otage quelque 30.000 personnes, assiégées au sein de Lucknow. L’armée britannique reprendra le contrôle en mars 1858. L’histoire de cette héroïne oubliée est contée dans le roman de Kenize Mourad (auteur du best-seller De la part d’une princesse morte): Dans la ville d’or et d’argent (Robert Laffont).

Les photographes affluent de nouveau vers Lucknow pour immortaliser les sites des combats. Ces oeuvres témoignent de bâtiments aujourd’hui disparus, des quartiers entiers ayant été détruits par mesure de répression et afin de sécuriser la ville coloniale.

De nouveaux mécènes remplacent les nawabs et officiers européens, tel Claude Martin (1735-1786), qui se fait construire des palais extravagants, mêlant pavillons d’inspiration moghole à une architecture et statuaire classiques. L’officier de la compagnie française des Indes Orientales Jean-Baptiste Gentil (1726-1799) a été le premier à établir un atelier de peinture en Awadh. L’ingénieur au service de la Compagnie anglaise des Indes Oriantales Antoine-Louis Polier a fait réaliser des albums regroupant peintures et calligraphies.
Ces nouveaux mécènes, donc, sont de petits rajas hindous et des taluqdars (riches propriétaires terriens hindous ou musulmans). Ils permettent l’essor de l’orfèvrerie et de la joaillerie.

Cette exposition d’oeuvres anciennes est portée en miroir par les photographies en noir et blanc d’Antonio Martinelli. Cet artiste vénitien vivant à Paris a photographié du même point de vue que les artistes du passé ce qui reste des édifices. Leurs images anciennes sont incrustées dans les cartels des photographies contemporaines.
Le plus: un diaporama numérique présenté sur un écran inséré dans l’entrebaîllement d’une vieille malle de voyage qui permet de voir l’intégralité des photos. Les images anciennes se dissolvent en fondu enchaîné dans les photos contemporaines en noir et blanc. Puis, elles évoluent vers la couleur.

Il est intéressant de découvrir ces oeuvres indiennes au musée Guimet, où l’on a plutôt l’habitude d’admirer des pièces d’Asie du sud-est. S’il est difficile aujourd’hui de vanter les vertus du colonialisme, il faut reconnaître que d’un point de vue artistique, il a donné lieu à de belles créations!

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