Le regard doux et poétique d’Helen Levitt sur le NY des pauvres

Helen LEVITT, New York, circa 1940 - (c) Helen Levitt / courtesy Laurence Miller GalleryHelen Levitt

Jusqu’au 23 décembre 2007

Fondation Henri Cartier-Bresson, 2 impasse Lebouis 75014, 01 56 80 27 00, 6€

La fondation HCB rend un hommage émouvant à la photographe américaine Helen Levitt (née en 1913), quatre ans après l’exposition inaugurale de la Fondation intitulée Les Choix d’Henri Cartier-Bresson (2003). Et pour laquelle Henri Cartier-Bresson, lui-même, avait sélectionné une photographie d’Helen Levitt. Aujourd’hui, c’est une centaine de tirages noir et blanc et couleur que la Fondation expose.

Helen Levitt vit à New York, ville où elle est née et a travaillé depuis le début des années 1930. Cette photographe autodidacte s’est inspiré du quotidien des habitants des quartiers modestes – Brooklyn, Harlem, Lower East Side – pour produire une oeuvre documentaire – malgré elle – et surtout poétique.

Son regard doux sur les jeux des enfants dans la rue, sur leurs graffitis, sur les conversations de ménagères, sur l’attitude des personnes âgées avides de capter l’énergie de la rue, donnent au visiteur contemporain un riche témoignage sur la vie de début du siècle à New York. Mais là ne réside pas le but d’Helen Levitt. Ce que l’artiste souhaite, c’est rendre la richesse visuelle et sociale de la vie de ces habitants pauvres.

Elle capte des gestes simples, usuels, qui pourraient se reproduire dans n’importe quelle ville. Mais avec ce petit quelque chose en plus qui fait toute la différence. Car Helen possède le don d’être là au moment opportun comme l’atteste cette photographie d’un petit garçon soulevant la jupe d’une petite fille alors que celle-ci joue avec une amie. Ou cette image de chaussures laissées seules devant la porte d’un taxi. L’artiste sait capter avec humour et émotion ces anecdoctes du quotidien.

« Elles [ces photographies] sont emplies des attributs de l’art comme si la rue était une scène, et ses habitants étaient des acteurs et des actrices, des orateurs et des danseurs » écrit John Szarkowski (1925-2007), ancien photographe et conservateur pour la photographie au Museum of Modern Art, New York (in Looking at Photographs, MoMA, 1973). D’ailleurs Helen photographie de nombreux enfants portant des masques. Comme si la vie était un carnaval.

Helen Levitt a été influencée par le surréalisme et le cinéma de Cocteau. Elle réalise deux films considérés comme précurseurs du cinéma américain indépendant (The Quiet One, 1949, et In the Street, 1952), projetés durant l’exposition.
Elle doit également beaucoup à Weegee (1899-1968) ou Eugène Atget (1857-1927). Et surtout, à sa rencontre avec Walker Evans (1903-1975) et Cartier-Bresson (1908-2004), qui l’ont convaincue de devenir photographe. A l’instar du dernier, elle achète un Leica (1936) et réalise un voyage (le seul à l’étranger) au Mexique (1941). Comme le premier, elle réalise une série sur le métro new-yorkais dans les années 1960.

Helen LEVITT, New York, 1980 - (c) Helen Levitt / courtesy Laurence Miller GalleryAprès avoir reçu une bourse Guggenheim pour étudier la photographie couleur (1959 et 1960), Helen immortalise quelques clichés aujourd’hui célèbres comme celui d’une petite fille mystérieusement accroupie dans un caniveau devant une voiture vert pomme. Ses premières prises de vue ont été volées au début des années 1970. Mais la récompense vient quatre ans plus tard, lorsque le MoMA organise, sous la tutelle de John Szarkowski, une projection continue de 40 de ses photographies couleur, intitulée Slide Show, avec la publication d’un ouvrage éponyme en 2005.

En 1998, l’artiste est enfin exposée en France, à la galerie Anne de Villepoix (Paris). Elle est aujourd’hui représentée – et ce depuis 1988 – par la galerie new yorkaise Laurence Miller.

Cette exposition, sous titrée avec pertinence « l’art de l’accident poétique », est agencée par Agnès Sire qui décrit l’artiste comme « rebelle dotée d’un esprit libre, frondeur et merveilleux ». L’artiste a en effet toujours refusé d’appartenir à tel ou tel mouvement (Photo League) ou école (de New York). A l’âge de 94 ans, la noble dame a eu une nouvelle fois la force de refuser que ses images soient reproduites dans le catalogue de la NY Public Library suite à une exposition de la Photo League (2007)… Une forte tête, et on aime ça!

A noter: « Les conversations de la Fondation HCB« . Le mercredi de 18h30 à 20h, entrée libre sur inscription préalable (contact@henricartierbresson.org). Au programme: mercredi 26 septembre 2007: Photographie surréaliste, l’image à la croisée de l’art et de la culture. Avec Michel Poivert, Professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, président de la Société française de la photographie. Mardi 13 novembre 2007: présentation des collections du Museum of Modern Art, New York. Avec Peter Galassi, chief curator du MoMA.

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