Le maître de la peinture danoise
Jusqu’au 22 juillet 2019
Musée Jacquemart-André, 158 boulevard Haussmann, Paris 8e
Tombé dans l’oubli en France – mais toujours admiré dans son pays natal – l’artiste danois Vilhelm Hammershøi (1864-1916) est exposé au musée Jacquemart-André. Son oeuvre est confrontée pour la première fois à celle de trois de ses contemporains.
Surnommé le Vermeer du XIXe siècle, Vilhelm Hammershøi excelle dans la représentation d’intérieurs silencieux et de paysages désolés. Sa palette se décline dans une vaste gamme de gris et de blanc, conférant à ses oeuvres une atmosphère mélancolique.
La première salle concentre les portraits de ses proches, qu’il peint sans un sourire, chacun regardant dans une direction différente. Une de ses oeuvres phares, Cinq portraits, évoque une scène nocturne mystérieuse dans laquelle cinq personnages sont assis à une table, sans que l’on sache pourquoi, aucun ne semblant préoccupé par le sort de l’autre.
L’artiste peint également sa femme Ida, souvent représentée de dos dans ses scènes d’intérieur, vêtue de noir. Dans Trois jeunes femmes, il la peint en compagnie de ses deux belles-soeurs, dont seuls les genoux se touchent, leur visage restant complètement absorbé par la lecture ou leurs pensées respectives.
La salle suivante confronte les intérieurs de Hammershøi à ceux de son beau-frère Peter Ilsted (frère d’Ida) et de son ami Carl Holsøe. Mais, à sujet identique, atmosphère complètement différente ! Les toiles des deux derniers sont enveloppées d’une luminosité douce tandis que celles de Hammershøi baignent d’une froide clarté.
A l’image de ses intérieurs, les paysages de Hammershøi se transforment en « paysages intérieurs » (Jean-Loup Champion, commissaire de l’exposition), tant l’artiste les dénude de toute humanité et de détail pittoresque.
Même ses représentations urbaines, telle la vue de l’église Saint-Pierre de Copenhague, sont dénuées de figures humaines. L’église est pourtant située dans un quartier très peuplé. Seul un arbre aux branches dénudées retient l’intérêt du peintre !
Ses nus semblent lugubres car peints dans un camaïeu de gris et blanc, loin de la carnation rosée des chairs vénitiennes !
Les deux dernières salles présentent les intérieurs qui ont rendu l’artiste célèbre. S’il représente son intérieur, volontairement sobre – à l’inverse des demeures des familles danoises aisées -, Hammershøi en efface même le peu de mobilier ou de décoration (livres, objets, tableaux) que les pièces contiennent.
La confrontation entre les oeuvres de Hammershøi et celles de trois de ses proches est censée mettre en avant la dextérité de l’artiste et sa modernité liée à la radicalité de ses compositions. Mais j’ai trouvé que les détails fleuris et lumineux de Holsøe, d’une grande finesse, permettaient de dépasser la sensation de froideur qui se dégage des toiles de Hammershøi. J’étais contente de retrouver le soleil en sortant de l’exposition !