Mythes et nature
Jusqu’au 25 juillet 2022
#jacquemartandre
Musée Jacquemart-André, 158 boulevard Haussmann, Paris 8e
Le musée Jacquemart-André présente l’oeuvre du Finlandais Akseli Gallen- Kallela (1865-1931), dans la continuité de son compatriote Albert Eldelfelt (1854-1905), présenté actuellement au Petit Palais. Son oeuvre se distingue de son aîné par un twist de symbolisme !
Les deux artistes excellent à la représentation de la lumière bleue nordique dans des paysages, essentiellement de lacs et de forêts, et revendiquent l’indépendance de la Finlande par rapport à l’occupant russe (la Finlande ne devient indépendante qu’à l’aune de la révolution russe de 1917).
Les deux artistes étudient à Paris, l’un à l’Académie Jérôme (Edelfelt), l’autre à l’Académie Julian (Gallen-Kallela), où ils s’imprègnent du courant naturaliste enseigné par Jules Bastien Lepage.
L’interprétation de la légende du Kalevala (épopée médiévale finlandaise écrite au 19e siècle) lance la carrière de Gallen-Kallela. Il en réalise un triptyque (La légende d’Aïno, 1888) en vue de l’Exposition Universelle de 1889. Finalement, il ne présente pas son oeuvre et rentre en Finlande.
Il se fait construire une maison-atelier en rondins de bois, au nord d’Helsinki, non loin du lac de Ruovesi (1894). Pierre Curie (conservateur au musée Jacquemart-André, commissaire de l’exposition), rapporte que l’artiste se serait vanter de n’avoir couper que deux arbres pour la bâtir ! Il en conçoit les meubles et les décorations, jusqu’aux vitraux inspirés de ceux du South Kensington Museum, grâce aux techniques de l’Arts & Crafts qu’il découvre à Londres.
La mort de sa fille aînée le plonge dans une grande tristesse. Il se lance dans une quête ésotérique qui se traduit dans ses gravures (technique qu’il a appris en Allemagne) par le thème de l’éphémère, la fragilité de la vie, à travers la représentation simultanée de la mort et d’une fleur qui, à peine éclose, est coupée.
S’ensuit une série mystique avec un traitement stylisé du paysage comme dans L’île des bienheureux (1897). L’îlot – symbole traditionnel antique de refuge et d’utopie – est traversé par un chemin qui serpente vers l’au-delà, synonyme d’élévation, de spiritualité de l’artiste. Le point culminant de cette quête sera sa représentation d’Ad Astra (1907) sur un triptyque : une femme nue, à la chevelure incarnant les rayons du soleil, lève les bras au ciel. Dans la seconde version de cette oeuvre, il peint les stigmates du Christ dans la paume de la jeune fille.
« Cette fusion d’éléments chrétiens et de concepts théosophiques, caractéristique de l’occultisme de cette époque, a été relevée par August Strindberg dans son roman parisien Inferno« , commente P. Curie.
Gallen-Kallela reprend progressivement goût à la vie avec sa femme Mary (Slöör) et la naissance de leur fils Jorma qu’il représente avec d’étonnantes couleurs vives dans Les Skieurs (1909). Toile qui constitue sa réponse au fauvisme et à l’expressionnisme allemand alors en vogue.
Les deux dernières salles de l’exposition présentent des paysages silencieux d’une nature préservée avec un lac et une forêt, des rochers recouverts de neige, ou aux beaux jours avec des arbres dont la verticalité répond au reflet de la lune sur l’eau.
Contrairement à Edelfelt, Gallen-Kallela représente beaucoup la neige ! La stylisation de ses paysages rendent son oeuvre remarquable. À découvrir !