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L’Europe de Gutenberg

Jusqu’au 16 juillet 2023

BnF site François-Mitterand, Paris 13e

La BnF propose une exposition sur l’invention de l’imprimerie avec des ouvrages exceptionnellement bien conservés, asiatiques et européens, dont certains ont appartenu aux rois de France.

Jean-Antoine Laurent (1763 – 1832) Gutenberg inventant l’imprimerie, 1831. Huile sur toile © Ville de Grenoble / musée de Grenoble – J.L. Lacroix

1450 – invention de l’imprimerie. Une date apprise à l’école, gravée en mémoire. Et le souvenir de mon imprimerie Nathan qui permettait d’écrire des textes avec des tampons en caoutchouc, revenu à la surface de ma conscience en apercevant la première toile qui ouvre le parcours : Johann Gutenberg (vers 1400-1468), représenté par Jean-Antoine Laurent (1763-1832) tel saint Jérôme, au moment où il réussit à imprimer la Bible. Que d’émotions !

Päkun (1298 – 1374), Päk un hoa sañ čʹorok bulčo čʹikčʹi simčʹe yočōl (Jik ji). Imprimé dans le temple Heung Deok, en Corée, en 1377 © BnF, département des Manuscrits

L’invention de l’imprimerie marque l’entrée de l’histoire occidentale dans la modernité avec l’impression à Mayence vers 1455 par l’Allemand Gutenberg d’une Bible de 42 lignes. L’exposition revient sur cette découverte technique qui bouleverse la reproduction des livres et leur diffusion, en précisant qu’ailleurs dans le monde, notamment en Chine et en Corée, d’autres méthodes d’impression préexistaient. En atteste le Jikji coréen, le plus ancien ouvrage conservé imprimé avec des caractères mobiles métalliques.

Bois gravé dit « bois Protat » Crucifixion, vers 1420. Allemagne du sud. Bois de noyer gravé en relief © BnF, département des Estampes et de la photographie

En Europe, Le Christ au Mont des Oliviers (Allemagne du Sud, vers 1420) fait office de l’une des plus anciennes xylographies occidentales et préfigure la gravure. Le Bois Protat est reconnu comme la plus ancienne matrice conservée de l’histoire de la gravure occidentale. Il a été retrouvé dans une propriété bourguignonne, acquis par l’imprimeur régional Jules Protat.

Biblia latina (Bible de Gutenberg). Imprimé sur parchemin par Johann Gutenberg et Johann Fust à Mayence, vers 1455 © BnF, Réserve des livres rares

« Gutenberg n’a sans doute pas eu connaissance de la pratique coréenne », admet Nathalie Coilly (conservatrice, Réserve des livres rares, BnF), co-commissaire de l’exposition. « En Europe, la majorité des livres sont recopiés à la main par des copistes. Mais les graveurs de médaille savent reproduire en grande quantité des pièces en métal. Gutenberg va utiliser leur technique de la matrice pour fabriquer des caractères mobiles et parvenir à imprimer en deux ans une Bible de 42 lignes, sur les 1300 lignes qu’elle contient. »

Schnellpressenfabrik Frankenthal Alter & Co. Reconstitution d’une presse à imprimer en bois. Frankenthal, 1925 © Mayence, Gutenberg-Museum

À sa suite, imprimeurs itinérants, professeurs au collège de la Sorbonne, humanistes italiens, expérimentent tous la typographie pour produire des livres, destinés à diffuser les enseignements humanistes auprès des élèves et des érudits.

Franchino Gafori (1451-1522), Practica musicae. Imprimé à Brescia par Angelo de’ Britannici en 1497 © BnF, Réserve des livres rares

La musique et les sciences sont ensuite mises à l’épreuve des presses, dont la démonstration d’un exemplaire est assuré du mardi au vendredi de 14h30 à 16h à partir du 18 avril (15mn, gratuit, sans réservation). Puis vient le temps de la reproduction des images et l’apparition de la couleur.

Hans Burgkmair, Saint Valentin, saint Étienne et saint Maximilien Dans Missale Pataviense. Imprimé à Augsbourg par Erhard Ratdolt en 1494 Gravure sur bois en relief en couleurs © BnF, Réserve des livres rares

Le parcours se poursuit avec des éditions imprimées luxueuses comme Les Vies de Plutarque, imprimées par Nicolas Jenson, l’un des premiers typographes de Venise. L’ouvrage a appartenu aux Agostini, riche famille de marchands et banquiers vénitiens. Ou l’édition De la bataille judaïque de Flavius Josèphe, imprimée sur parchemin par Jean Maurand, détenue par Charles VIII, premier roi de France à posséder des imprimés, dont la BnF a hérité.

Le triomphe de la Renommée Dans Pétrarque (1304 – 1374) Trionfi (Les Triomphes). Imprimé à Venise par Giovanni Capcasa en 1492 – 1493. Gravure sur bois en relief © BnF, Réserve des livres rares

Charles VIII avait compris l’importance des livrets imprimés pour diffuser les nouvelles et faire de la propagande politique. C’est ainsi que les Français apprennent la prise de Naples par les armées royales. De même, Maximilien Ier, Empereur du Saint Empire romain Germanique (1508-1519), recourt à l’imprimé pour diffuser son image et glorifier ses victoires – cf. son Arc de triomphe qui se déploie sur plus de trois mètres de haut.

Le parcours se termine sur les critiques qui fusent en raison de l’augmentation du nombre d’imprimés. Érasme considère que la parution incessante de nouveaux imprimés nuit à l’étude des maîtres anciens, seuls auteurs intellectuellement intéressants à étudier. En tant que médecin, Rabelais met en garde contre la diffusion à grande échelle des inexactitudes : une erreur dans un ouvrage de médecine peut être aussi fatale qu’un coup de feu.

Trop d’informations tue l’information. C’est ce que notre époque actuelle connaît. Comment gérer le flux d’information ? Quel est le rôle de la bibliothèque à l’ère numérique ? Éléments de réponse dans le documentaire qui clôt ce parcours passionnant.

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3 réponses à Imprimer !

  1. Louis dit :

    Un article extrêmement intéressant, écrit d’une manière fluide. Sa lecture n’en n’est que plus agréable !

  2. Victoria Eyre dit :

    J’adore !

  3. Clément Petit dit :

    Je recommande ! L’article résume très bien l’exposition, j’ai appris beaucoup de choses.

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