1ere partie: jusqu’au 9 novembre 2008
2eme partie: du 18 novembre au 4 janvier 2009
Musée Cernuschi, 7, avenue Vélasquez 75008, 7,50€
Dans le cadre du 150e anniversaire des relations franco-japonaises, le musée Cernuschi accueille une magnifique exposition de peintures de la période Edo (1615-1868) issues du musée Idemitsu. Un industriel et collectionneur japonais dont sont actuellement exposées les oeuvres de Rouault à la Pinacothèque de Paris. Divisée en deux temps, l’exposition du musée Cernuschi met en valeur la beauté des courtisanes et les scènes de divertissement qui se répandent à partir du XVIe siècle dans un Japon en plein essor urbain.
Alors que le Japon connaît une longue trêve de paix entre 1615 et 1868, la ville d’Edo, qui deviendra Tôkyô en 1868, se construit ex nihilo et atteint rapidement le million d’habitants. Edo est la capitale du shogun (commandement militaire contrôlant le pouvoir politique, administratif et plus tard économique) TOKUGAWA Ieyasu, qui a unifié le pays au XVIIe siècle. Kyôto reste la résidence de l’Empereur et un centre majeur de l’artisanat de luxe tandis qu’Osaka, surnommée Niho no daitokoro (cuisine du Japon) constitue une plaque tournante commerciale.
Les courtisanes représentent la fine fleur du divertissement de l’époque. Elles se distinguent par leurs tenues luxueuses et leur obi (ceinture) nouée devant. Les courtisanes de haut rang, les tayû, recoivent une éducation poussée, axée sur la musique, la poésie et la danse. Leur talent impose l’admiration des clients, qui doivent les respecter et suivre une ligne de conduite stricte (showake). A commencer par utiliser un langage réservé aux courtisanes, le arinsu kotoba, qui imite celui pratiqué à la cour impériale. Le service des courtisanes étant très honéreux, seuls la haute noblesse, les daimyos et les riches marchands peuvent y recourir.
Au XVIIIe siècle, les tayû perdent progressivement leur prestige au profit de courtisanes d’un nouveau type, les oiran, tandis que les geisha ou geigi se spécialisent dans la danse et la musique.
La prostitution concerne également des filles de bas rang, pratiquant leur activité dans les établissements de bain, les auberges, les restaurants ou les maisons de thé. Ce que la peinture du Monde flottant – ukiyo-e – se garde de représenter. D’où le titre de l’exposition – un clin d’oeil à l’oeuvre de Balzac – qui omet le terme « misère » des courtisanes.
A la fin du XVIIe siècle, le théâtre kabuki devient un loisir important de la vie publique. Trois théâtres officiels d’Edo en donnent des représentations. Ainsi, selon commissaire de l’exposition, Michel Maucuer, les aristocrates du XVIIe siècle cherchent non seulement à se distraire mais également à se cultiver pour imiter leurs ancêtres lettrés.
L’ukiyo-e décorative s’est répandue dans les intérieurs de maisons grâce au développement de la technique de la gravure sur bois. La xylogravure a longtemps été réservée aux ouvrages religieux, philosophiques et à quelques grands classiques littéraires. Mais dans les années 1600, elle est appliquée pour illustrer des romans, comme le populaire Contes d’Ise (Ise Monogatari). Les illustrations reflètent les moeurs contemporaines tout en faisant référence au passé (cf. le drapé des kimonos, qui évoquent des légendes anciennes). La xylogravure est également utilisée pour réaliser des estampes.
D’abord monochromes (sumizuri-e), les estampes sont ensuite coloriées à la main (tan-e). Les estampes modernes ou « estampes de brocar » (nishiki-e), réalisées par impression et aux couleurs multiples, sont inventées en 1765.
Si les estampes coûtent relativement peu, la peinture ukiyo-e (nikuhitsu ukiyo-e ou peinture concrète) s’adresse à une clientèle aisée. Elle prend la forme de rouleaux suspendus (kakemono), de rouleaux en longueur destinés à être regardés en les déroulant (emaki), de paravents (byôbu-e) ou de cloisons (fusuma-e).
Dans le cas des rouleaux suspendus de la soie orne le dessus de la peinture. Une soie usée, pour qu’elle ne bouge plus, qui provient d’ancien kimono.
A noter, un cycle de conférences, en accès libre, accompagne cette splendide exposition.