L’enfance en lumière
Jusqu’au 25 janvier 2026
Petit Palais, avenue Winston Churchill, Paris 8e
L’enfant devient un être digne d’attention au XVIIIe siècle. Jean-Baptiste Greuze (1725-1805) exprime dans ses oeuvres toute la luminosité de ces petits êtres chers ! Mais son oeuvre dévoile bien plus que leur innocence.
Le Petit Palais consacre une monographie au peintre Jean-Baptiste Greuze à l’occasion du 300e anniversaire de sa naissance. Connu de son temps pour ses portraits et scènes de genre, il est depuis tombé dans l’oubli.
à son fils Caracalla d’avoir voulu l’assassiner, 1767-1769. Huile sur toile.
© Paris, GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Photo Michel Urtado
Le parcours retrace à travers la thématique de l’enfance sa brillante carrière, recherché par les collectionneurs, acclamé par la critique et le public. Au point d’oser faire attendre l’Académie royale de peinture et de sculpture 13 ans (!) avant d’envoyer son morceau de réception (Septime Sévère reprochant à son fils Carcalla d’avoir voulu l’assassiner, 1767/69).
Jean-Baptiste Greuze est reconnu pour son sens du détail et sa capacité à traduire l’âme humaine. Admirez la manière dont il grave les pages d’un livre, dont il rehausse la vivacité d’une chevelure en y ajoutant de petits traits rouges (Un enfant qui s’est endormi sur son livre, 1755), ou encore l’empatement au niveau du contour des yeux.
L’artiste peint sa famille, sa femme, ses enfants, leur petit épagneul. Il défend les idées des philosophes des Lumières (Rousseau, Diderot), selon lesquelles les parents doivent jouer un rôle important dans l’éducation des enfants. Pour eux, la famille conditionne le destin des hommes, autant leur bonheur que leur désintégration. Elle peut être un havre de paix comme un lieu de cruauté physique et psychologique.
Souvent à cause du rôle du père, contrepoint de la figure de l’enfant dans les peintures de Greuze. Son éducation déficiente peut engendrer un fils tueur comme dans Septime Sévère, jugé responsable de la décadence de l’Empire romain. Dans La Malédiction paternelle. Le Fils ingrat (1777), le départ du fils serait lié à l’irresponsabilité du père.
À partir de ses 50 ans, la renommée du peintre retombe, en même que se détériore sa relation avec sa femme, dont il divorce en 1793, tout juste un an après sa légalisation par l’Assemblée Nationale. Ses deux filles, formées à la peinture, restent auprès de leur père jusqu’à sa mort.
J’ai trouvé que les peintures les plus poignantes étaient celles des enfants et des jeunes filles qui deviennent adultes, capturées dans des jeux de textures raffinées (satin, gaze) et des couleurs pures (rose pâle, blanc, crème). Là encore, l’artiste sait glisser de l’ambivalence dans son récit : derrière l’innocence de la jeunesse se cache l’appétit lubrique de jeunes prédateurs ou de vieillards (La Cruche cassée, 1771/72).