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Les fleurons de la collection Barbier-Mueller

Afrique, Océanie

Jusqu’au 24 août 2008

[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-CHEFS-D-OEUVRE-DE-LA-COLLECTION-BARMU.htm]

Musée Jacquemart-André, 158, bd Haussman 75008, 01 45 62 11 59, 10€

« La plus belle collection privée d’arts africain et océanien ». Excusez du peu mais Monsieur Jean-Paul Barbier-Mueller a de quoi être fier! Le musée Jacquemart-André rassemble pour la première fois les fleurons de sa collection, constituée depuis trois générations de passionnés d’art. Une exposition intense à découvrir avant que ces chefs-d’oeuvre ne repartent pour Genève…


Sobrement intitulée Afrique, Océanie, l’exposition présente, à travers une scénographie tout aussi épurée, une centaine de sculptures qui offrent une exceptionnelle variété de visages et de corps aux expressions mystérieuses.
Emblème suprême de cette collection prestigieuse: le sceptre au cavalier du Nigeria, daté du XIIe sièclele, surnommé la « Joconde de la collection » car il n’existe aucun équivalent référencé au monde.

« Il était une fois, un garçon orphelin, prénommé Joseph Mueller, vivant à Soleure (près de Berne, en Suisse), autrement dit out of nowhere! Il hérite d’une part de la fabrique d’horlogerie paternelle. Le père de l’un de ses amis, féru d’art contemporain, l’emmène régulièrement à Paris. C’est là que Joseph tombe en arrêt devant un portrait de Picasso. A l’âge de 18 ans (1907), il achète sa première oeuvre ». Ainsi commence le conte de la famille Barbier-Mueller, tel que le rapporte Jean-Paul Barbier-Mueller, gendre de Joseph Mueller.

En 1910, Joseph possède une demi-douzaine de tableaux de Ferdinand Hodler, un Cézanne, un Van Gogh… A la fin de la Première Guerre mondiale, Joseph se fxe à Paris. « Il habite à Montparnasse, dans un atelier d’artiste, avec un robinet et des toilettes à la turc pour tout le palier ». Joseph est criblé de dettes mais il possède des peintures et quelques statues antiques. En 1955, il offre à sa fille unique, Monique, La Forêt Enchantée de Marx Ernst pour son mariage avec Jean-Paul.

Jean-Paul Barbier-Mueller découvre avec son beau-père l’exigence du collectionneur érudit. A 25 ans, il possède lui-même quelques bronzes et des livres de poésie française du XVIe siècle. Il ne se reconnaît pas l’oeil instinctif comme celui de Joseph ou de son fils cadet, qui savent juger un peintre inconnu. « J’étais d’ailleurs plus attiré par la sculpture », confie-t-il, « et particulièrement par les oeuvres ‘primitives’, dans lesquelles l’auteur ne subit aucune des tentations guettant son confrère occidental: il crée en effet par nécessité (magique ou religieuse), sans le souci de savoir que sa production va être exposée dans une galerie, jugée par des critiques, bien ou mal vendue. Dans son entourage, on n’apprécie pas son oeuvre en termes de qualité esthétique, même s’il est certain que des spectateurs (comme chez nous) ressentent cette dimension supplémentaire, non indispensable pour la bonne exécution du rite ».

Jean-Paul Barbier-Mueller n’a de cesse de faire voyager ses oeuvres – il a participé à 80 expositions à travers le monde – pour partager ses trésors avec un public « qui ne peut que tomber par terre devant ces fleurons; sinon vous n’êtes pas des êtres humains », s’exclame-t-il!

Pour chacune des oeuvres, le contexte est restitué. Ainsi des deux sculptures Batak du XIXe siècle. Des statues anthropomorphes sont créées pour immortaliser le souvenir de personnages puissants (chefs de village, sorciers). A leurs décès, ces portraits prennent le statut d’effigies ancestrales.
Le chef monte un animal mythologique, singa, représenté sous la forme d’un immense serpent (ou d’un buffle au corps couvert d’écailles), qui incarne le monde moyen. Il est chargé de transporter les âmes des défunts nobles vers les cieux. C’est ainsi que les hommes auto-justifient leur existence sur terre, en apportant l’équilibre à l’ordre cosmique, entre les forces du Bien et du Mal.

« On m’a souvent demandé de prêter mes oeuvres pour en faire des répliques en résine », ajoute J.-P. Barbier-Mueller. Mais il a toujours refusé car ses pièces n’ont de valeur que par les rites ancestraux qui lui sont associés. « Ce sont nous, Occidentaux, qui conféront à ces oeuvres une valeur d’art. Ces statues ne doivent pas retourner en Afrique ». Le débat est ouvert…

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