La collection de Monsieur Thiers
Jusqu’au 25 août 2025
Musée du Louvre, aile Sully, Paris 1er
Le musée du Louvre présente la collection d’Adolphe Thiers (1797-1877), journaliste, historien et homme politique français, et sa passion méconnue pour la culture chinoise. À une époque où celle-ci commence tout juste à se faire connaître en Europe.
Bourgeois marseillais désargenté, abandonné par son père, Adolphe Thiers a pour ambition de se hisser au firmament de la société parisienne. Il atteint son objectif lorsqu’il quitte ses fonctions dans la presse pour devenir député, ministre, puis Président de la République (1871-1873).
La première section du parcours présente cet homme autant décrié qu’admiré, arriviste sans aucun scrupule, comparé au personnage de Rastignac (Balzac). Son cabinet de travail et sa bibliothèque ici reconstitués, mettent en valeur sa passion pour la Renaissance italienne autant que pour la Chine, née dès son adolescence. Deux cultures qu’il place au même rang – une idée surprenante pour l’époque.
« Thiers ne collectionne pas pour l’esthétisme des objets », commente Jean-Baptiste Clais (conservateur en chef au département des Objets d’Art, musée du Louvre), commissaire de l’exposition. « Mais pour servir son ascension sociale. Inversement, le réseau d’érudits qu’il développe va lui permettre de nourrir cette collection ».
Thiers n’ira jamais personnellement en Chine. Il se l’imagine à travers les objets qu’il collectionne. Dont ce rouleau rare, réalisé par deux peintres actifs sous la dynastie Yuan (13e siècle), Gong Kai et Ren Renfa, et un brûle-parfum tripode ding (dynastie Yuang).
Des cartes géographiques, des peintures sur soie de costumes chinois, paysages et architecture locale, forment le coeur de sa collection.
La seconde section du parcours se concentre sur son ensemble de céramiques, des coupes en jade aux vases en porcelaine, dont il était un expert reconnu.
La collection comprend également des textes religieux qui illustrent les trois confessions chinoises : le bouddhisme, le taoïsme, et le confucianisme.
Dans ce domaine, J.-B. Blais ne pense pas que Thiers maîtrisait complètement la symbolique de l’iconographie religieuse. Tout comme il ne cache pas que sa collection ne contient pas assez d’éléments sur l’importance de la représentation du thé, du riz, de la soie, dans la culture chinoise. En revanche, elle reflète bien le poids de la langue, de la poésie, et de la nature, dans cette civilisation qui venait tout juste de s’ouvrir (de manière forcée) à l’Europe.
Un propos brillant dans une scénographie lumineuse.