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Visions du monde dans l’Egypte ancienne

Les Portes du Ciel

Jusqu’au 29 juin 2009

[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-LES-PORTES-DU-CIEL-PCIEL.htm]

Musée du Louvre, Hall Napoléon, entrée par la pyramide, 75001, 11€

Décrypter la richesse de la pensée égyptienne ancienne relative au mythe de la création divine et humaine. Telle est la thématique de la nouvelle exposition du musée du Louvre, « Les Portes du Ciel », qui nous transporte dans un monde fabuleux mi-imaginaire mi-réel. Très loin des conceptions occidentales cartésiennes.

Dans l’Egypte ancienne, les « portes du ciel » se rapportent aux battants qui ferment le tabernacle – meuble sacré abritant la statue d’une divinité. Ouvrir ces portes, c’est relier le monde des hommes à celui des dieux. Et, péréniser l’univers en renouvelant son processus de création.

Le mythe de la création égyptienne repose sur la conception d’un univers peuplé de divinités qui ont engendré les hommes.

A l’origine, une étendue liquide, appelée Noun, renferme des entités à potentiel divin. Cette structure, obscure, désordonnée, prend forme grâce à l’apparition d’une aire solide à la surface de Noun. Les composantes divines prennent conscience de leur existence et refoulent les eaux ; ce qui permet l’édification de l’univers.

Chaque ville égyptienne vénère ses propres entités divines, responsables de la création du monde: Atoum à Héliopolis (banlieue du Caire actuel), Ptah à Memphis (au sud du Caire actuel), enfant reposant sur un nénuphar à Hermopolis (Moyenne-Egypte).

La semence des dieux créateurs engendre des êtres divins sexués, dont les faux jumeaux Chou, associé à l’homme, et Tefnout, associée à la femme. Cette différenciation des sexes divins assure la poursuite de la création par la reproduction. Chou et Tefnout ont pour enfants, Nout – le ciel (entité féminine) – et Geb – la terre (entité masculine) -. Ils représentent les quatre éléments primordiaux qui définissent les contours tangibles de l’univers créé.

Atoum a pour fils Osiris et Seth, pour filles, Isis et Nephthys. Osiris épouse sa soeur Isis, représentée par un noeud de ceinture rouge. Jaloux de son frère aîné, Seth décapite Osiris et lui ravit le trône. Isis ressuscite son frère-mari en réunissant ses membres – ce à quoi fait référence le pilier Djed qui le représente – le temps d’enfanter un héritier, Horus. A sa majorité, celui-ci combattra son oncle et reprendra le pouvoir sur la bénédiction des dieux supérieurs.

Viennent ensuite les pharaons qui sont choisis par les dieux pour prolonger sur terre l’ordre cosmique, incarné par la déesse Maât. Chaque pharaon est considéré comme un nouvel Horus, archétype du souverain égyptien représenté par le faucon divin. Héritier divin et légitime, le pharaon doit construire des temples pour assurer le culte des dieux et prouver qu’il est digne de sa fonction.

La création de l’univers met en place deux cycles d’éternité. Un, dynamique, heh, représentant la course perpétuelle des astres. L’autre, statique, djet, associé à la terre qui accueille la dépouille immortelle d’Osiris.

Le monde se décompose ainsi en trois entités. La terre où résident les être vivants, le ciel qui accueille les divinités et l’au-delà, la Douat, pour les défunts, qu’ils soient humains ou divins. Ces espaces sont structurellement inter-dépendants et communiquent entre eux par des passages, assimilés à des portes. Que le défunt peut franchir ou non.

Le mort doit comparaître devant 42 juges et prouver son innocence – absence d’action contraire à l’ordre cosmique. Une conception visuellement représentée dans les Livres des Morts par des plateaux de balance portant d’un côté le coeur du défunt et de l’autre une image de la déesse Maât. Si le verdict est positif, le défunt est déclaré « juste de voix » et peut rejoindre le monde souterrain d’Osiris.

Une partie du corps du défunt reste auprès d’Osiris. Grâce au procédé de la momification, d’autres composantes de son être, le ka et le ba, survivent. Elles sont envoyées dans la chapelle surmontant  la tombe, qui est localisée aux confins du désert afin de ne pas côtoyer de trop près les vivants. Bien que ceux-ci doivent honorer le mort en faisant des offrandes et des prières aux dieux pour qu’ils accueillent le défunt. Après cette « sortie au jour », le ka et le ba retrouvent le monde souterrain et le corps de leur hôte.

Ce cycle de vie éternelle suit le lever et le coucher du soleil, astre divin qui prend trois formes: Khépri à l’aurore, Rê-Horakhty à son zénith et Atoum au couchant. Les horizons de l’Ouest et de l’Est forment les portes du ciel qui, par leur ouverture immuable, assurent la succession du cycle diurne et nocturne et marquent la victoire éternelle du soleil.

Ce cheminement de la lumière à l’ombre à la lumière est visuellement marqué dans l’exposition par un subtil registre de couleurs. Les oeuvres, certaines présentées pour la première fois en France, sont exceptionnelles. Marc Etienne, conservateur au département des Antiquités égyptiennes au musée du Louvre, a osé une approche originale par le biais de l’étude du tabernacle, objet à la fois humain et divin, qui synthétise les visions du monde dans l’Egypte ancienne. Un défi qu’il a su relever avec brio.

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