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L’héritage laissé par Benjamin Franklin aux Français

Benjamin Franklin, un Américain à Paris (1776-1785)

Jusqu’au 9 mars 2008

Musée Carnavalet, 23, rue de Sévigné 75003, 01 44 59 58 58, 7€

Dans le cadre de la célébration du tricentenaire de la naissance de Benjamin Franklin (1706-1790), le musée Carnavalet revient sur le séjour à Paris de ce grand scientifique et père fondateur de la Constitution américaine, entre 1776 et 1785. Un séjour qui l’a rendu définitivement célèbre en France pour ses idées, malgré lui, révolutionnaires.


Trois cent quarante peintures, sculptures, objets et documents diverses illustrent les différentes facettes et aptitudes de la personnalité de Benjamin Franklin, premier citoyen des deux mondes.

Envoyé à Paris en tant que diplomate par le Congrès américain, pour s’assurer du soutien de la France à la guerre d’indépendance des Etats-Unis, Benjamin Franklin suscite aussitôt l’engouement des cercles éclairés. « Les Français en général sont un peuple aimable, et j’ai la bonne fortune de jouir d’autant d’estime et d’affection de toutes les classes de la société que je pouvais l’espérer » (Lettre à Jane Mecom, le 22 avril 1779). Franklin se lie d’amitié avec les philosophes des Lumières, Voltaire, Rousseau dont il emprunte le bonnet en fourrure pour se faire tirer le portrait, et les Encyclopédistes Malesherbes, d’Alembert, etc.. Il est rapidement perçu comme une incarnation américaine des Lumières.

Derrière une apparence simple, les cheveux portés longs, au naturel, Franklin sait utiliser sa bonhomie physique, pour s’attirer la sympathie de tout un réseau auprès de l’élite parisienne, en particulier des femmes d’influence, telle Madame de Jouy, musicienne renommée, qui soutient la cause de l’indépendance des Etats-Unis (cf. sa Marche des Insurgents). Elle lui fait connaître les peintres Fragonard et Greuze. Franklin rencontre aussi la veuve du philosophe Helvétius, qui promeut la loge maçonnique des Neuf Soeurs – une allusion aux neuf muses -, loge qui compte parmi ses membres Voltaire, Mirabeau, La Fayette, etc.. Franklin y adhère également.

« Il était de bon ton d’avoir Franklin à dîner, de lui donner des fêtes. Les femmes surtout s’empressaient de le visiter et de lui parler des heures entières, sans s’apercevoir qu’il les comprenait peu, faute d’usage de notre langue […] (Notes de l’abbé de La Roche). Franklin en effet parle peu car il connaît mal le Français. Paradoxalement, cette lacune joue en sa faveur car elle le fait passer pour un silencieux, associé à l’image du Sage.

Les contacts éclairés de Franklin jouent en sa faveur et lui permettent d’apporter une conclusion positive à sa mission diplomatique. Le document original du traité de paix du 3 septembre 1783 signé à Versailles par les protagonistes de l’indépendance américaine, dont La Fayette et Georges Washington, est présenté dans cette exposition.

Homme politique, Benjamin Franklin n’en est pas moins un self-made man pragmatique et un scientifique émérite. Il est connu pour son invention du paratonnerre, ses travaux sur la foudre et l’électricité (d’où sa présence dans l’oeuvre de Dufy, La Fée Electricité, exposée dans la dernière salle de l’exposition).

Né dans une famille modeste, puritaine, et conformiste, à Boston (1706), Benjamin Franklin est placé par son père très tôt, chez un imprimeur. Il se familiarise avec l’impression des journaux et écrit ses premiers textes, lettres humoristiques et politiques défendant la liberté d’expression.

B. Franklin s’enfuit de ce milieu en 1723 pour atteindre Philadelphie. En 1730, il devient l’imprimeur officiel de la Pennsylvanie. En épousant Deborah Read (1704?-1774), il conforte sa position sociale. Il s’éloigne de son éducation religieuse tout en restant attaché au puritanisme, qui autorise l’ascension sociale et l’enrichissement personnel.

Franklin se retire des affaires rapidement pour fonder en 1731 la Library Company of Philadelphia, première bibliothèque publique d’Amérique du Nord, par souscription. En 1749, sa proposition d’ouvrir une académie pose le fondement de la future université de Pennylvanie. Soucieux du bien-être de ses compatriotes, Franklin est responsable de la création de la première compagnie de sapeurs-pompiers. Il fait rénover l’éclairage urbain et le pavage des rues. Enfin, il crée le premier hôpital de Pennylvanie. A lui seul, Franklin joue le rôle d’un véritable Etat Providence!

Après son retour aux Etats-Unis, Franklin est repris par les idéologistes révolutionnaires français. Alors qu’à son arrivée dans l’Hexagone, il est reconnu pour ses inventions scientifiques et son avis médical – il se prononce contre le mesmérisme (prémices de l’hypnotisme) qui fait polémique à l’époque pour distiller des « titillations délicieuses » à ses patientes! -, à son départ, Franklin est perçu comme un défenseur des libertés et auréolé de la gloire de la révolution américaine. Sa mort donne lieu à des célébrations officielles en France. Mirabeau prononce son éloge funèbre à l’Assemblée Nationale: « Franklin est mort […] il est retourné au sein de la Divinité […]. L’Europe éclairée et libre de droit […] un témoignage de souvenir et de regrets à l’un des plus grands hommes qui aient jamais servi la philosophie et la liberté. »

Pour plus d’informations, allez voir bien sûr cette superbe exposition, tant sur le plan du contenu que de sa scénographie. Vous pouvez également consulter les volumes 23 à 37 de The Franklin Papers of Benjamin Franklin consacrés à son séjour en France.

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