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Les Guerriers de Xi’an

« Les Soldats de l’Eternité »

Jusqu’au 14 septembre 2008

[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-LES-SOLDATS-DE-L-ETERNITE-XIAN.htm]

Pinacothèque de Paris, 28, Place de la Madeleine 75008, 01 42 68 02 01, 10€

Des milliers de soldats en terre cuite! Telle a été la dernière volonté mégalomane de l’Empereur Qin (221 – 206 avant J.-C.), premier Empereur de Chine, retrouvé enterré parmi une légion de guerriers imaginaires, grandeur nature. La Pinacothèque de Paris en expose 20 spécimens entourés d’une centaine de pièces décoratives retraçant la vie quotidienne à l’époque de la dynastie Qin. L’une des plus stupéfiantes découvertes archéologiques du XXe siècle.


Divisée en trois parties, l’exposition sur « Les Soldats de l’Eternité » présente quelques pièces majeures de la nécropole de Xi’an, en commençant par restituer le contexte politique et culturel de la dynastie Qin (prononcé « Tsin »).

L’Empereur Qin Shihuangdi, Premier Auguste Empereur des Qin, a été l’un des plus puissants de l’histoire chinoise. Depuis le royaume de Qin, petite principauté fondée au IXe siècle avant J.-C., Qin a unifié les provinces alentours en un empire centralisé et a donné son nom à la Chine.
Bien qu’avide de pouvoir, c’est à lui que le pays doit un système normalisé de poids et de mesure, des réseaux extensifs d’irrigation, des routes et canaux pour favoriser la communication administrative et le commerce. Par ailleurs, l’Empereur Qin a fait construire une frontière aujourd’hui légendaire, connue sous le nom de Grande Muraille.
La dynastie impériale ne survivra qu’un an après la mort du Premier Empereur. Par la suite, la propagande confucéenne ternit la renommée des Qin – en raison de leur tyrannie -. Mais force est de reconnaître que les institutions politiques qu’ils ont léguées ont perduré jusqu’au XXe siècle.

Les dernières recherches archéologiques ont permis de dévoiler cet héritage indéniable grâce à l’étude de la nécropole découverte près de l’actuelle ville de Xi’an (province du Shaanxi). Elle se compose du tombeau de l’Empereur ainsi que de fosses souterraines, qui contiennent la légion de guerriers en terre cuite.

Après la présentation de quelques pièces clés de cette armée imaginaire en guise de préambule (dont un char en bronze et un cheval sellé), l’exposition débute au-sol par le décryptage de deux cloches du VIIe siècle, portant des inscriptions exprimant les ambitions politiques des souverains Qin. Ces cloches ont été réalisées par des aristocrates – les seuls autorisés à pratiquer le culte des ancêtres -, et égayaient de leur musique les cérémonies princières. Leurs inscriptions ont permis de comprendre la stratification hiérarchique des provinces chinoises.

Au cours des siècles, les différentes principautés, dont Qin, évoluent de manière à ce quelques souverains omnipotents dominent une masse de sujets. Dès le VIIe siècle, les premiers signes d’affaiblissement des élites traditionnelles s’observent. « Des changements manifestes dans la culture matérielle telle qu’elle est représentée par le mobilier funéraire, notre principale source d’information, reflètent le déclin du culte ancestral », expliquent les commissaires de l’exposition, Lothar von Falkenhausen et Alain Thote. « L’équipement rituel devient de plus en plus modeste, et on observe une prééminence croissante d’objets destinés à l’usage quotidien », ajoutent-ils. Le pouvoir bascule progressivement de l’aristocratie en faveur de quelques souverains.

Au cours du Ier millénaire avant J.-C., cette culture de plus en plus matérielle s’étend à l’ensemble de la Chine. La position des corps dans la nécropole – jambes pliées et non allongées – reflète l’extension de la culture Qin au reste de l’Empire. Forte de ces récentes découvertes, l’historiographie nouvelle avance que les coutumes Qin ont elles-mêmes été influencées par les mondes iranien et méditéranéen.

La sélection de guerriers de Xi’an présentée à la Pinacothèque de Paris – la plus célèbre des découvertes archéologiques en dehors de la Chine – offre une vision représentative de ce qui a été exhumé des sites. Hormis leur couleur, dont les pigments sont restés attachés à la terre et non aux corps des soldats. « Le procédé technique pour stabilier le revêtement polychrome n’a été découvert que récemment », explique Alain Thote, « ce pourquoi la tombe de l’Empereur n’a pas encore été fouillée. Nous n’avons pas encore les moyens humains – il faudrait un grand nombre d’archéologues – et scientifiques pour permettre une telle opération ».
Les soldats provenant des fosses alentours, découvertes en 1974, ont été restaurés et se dressent maintenant dans leur position de combat originelle. Telle que l’avait imaginée l’Empereur Qin.
Fantassins, guerriers, cavaliers, archers, conducteurs de chars, cochers…le réalisme des statues impressionnent. Jusque dans le détail des vêtements, des armures à plates qui imitent le cuir, des visages.

Devant la grandeur de cet art, des réserves s’imposent. A quel prix humain, la gloire de la dynastie Qin s’est-elle maintenue? Ces anonymes qui oeuvraient pour leur Empereur étaient-ils fiers de leurs sacrifices? La splendeur de cette armée fictive ne fait-elle pas, finalement, l’apologie d’une certaine violence? Des interrogations qui ne sont pas sans rappeler le contexte dans lequel le chantier des Jeux Olympiques à Pékin se construit…

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