Jusqu’au 01 août 2010
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-DU-GRECO-A-DALI–GRECO.htm]
Musée Jacquemart-André, 158 bd Haussmann 75008, 11€
On connaît l’apport de Goya, du Greco, Picasso, Dali, Juan Gris, Miro, Sorolla, pour n’en citer que quelques-uns, à l’Histoire de l’Art. Mais d’autres peintres espagnols, tels Murillo, Ribera, Coello jusqu’à Tàpies, ont contribué à façonner l’évolution artistique sur le continent européen. C’est ce que nous montre l’exposition du musée Jacquemart-André, « Du Gréco à Dali », à travers la riche collection de l’homme d’affaires hispano-mexicain, Pérez Simon.
Juan Antonio Pérez Simon (né en 1941 en Asturies) collectionne depuis les années 1970, peintures (2.000), sculptures, dessins, gravures, manuscrits (bibliothèque de plus de cinquante mille volumes). Passionné d’art, il a su constituer l’une des plus importantes collection d’Amérique Latine, aujourd’hui reconnue dans le monde entier. Elle est exposée pour la première fois à Paris.
L’exposition propose une approche thématique. Elle rassemble des oeuvres au sein d’une même pièce, de périodes différentes, pour mieux faire ressortir les continuités et ruptures esthétiques de la peinture espagnole. De son âge d’or, au XVIe siècle, jusqu’à nos jours.
Parmi les thèmes récurrents figurent les représentations des fêtes royales et populaires, la peinture religieuse, les scènes de plein air, en particulier, marines, avec des enfants ou des femmes sortant de l’eau.
Charles Quint (1500-1558), petit-fils d’Isabelle la Catholique et de Ferdinand, roi d’Aragon, est le premier à régner sur une Espagne unifiée et profondément catholique. Avec son fils Philippe II (1527-1598), qui chosit Madrid comme capitale (1561), ils forgent les caractéristiques de l’image souveraine espagnole.
Cette identité passe par le goût royal pour les fêtes – jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, les monarques président les festivités depuis le balcon du palais royal ou sur la Plaza Mayor de Madrid – et les grandes manifestations religieuses. Ils veillent également à respecter la diversité des coutumes provinciales, ce qui donnera jour au XIXe siècle au Costumbrisme.
Sous Philippe II, le concile de Trente (1545-1563) prend racine autant en Espagne que dans les pays sud-américains conquis. Le développement des ordres et l’évangélisation des peuples « sauvages » expliquent l’augmentation des commandes d’oeuvres religieuses.
L’oeuvre de Greco surprend. Surtout connu pour ses représentations monumentales, il est ici représenté par une miniature, qui rappelle son activité première d’enlumineur. De manière caractéristique, le visage est allongé tandis que le cou est fort. Le Christ, en larmes, porte une tunique rouge au col arrondi et est entouré d’un halo en forme de losange. Tête du Christ (vers 1600) n’avait encore jamais été montrée en Europe.
Le portrait d’enfant a longtemps été réservé à la peinture de cour, de Alonso Sanchez Coello (1531/32-1588) à Francisco de Goya y Lucientes (1746-1828). A partir du XIXe siècle, Antonio Maria Esquivel (1806-1857), représentant du mouvement romantique à Séville, amorce une transition vers la peinture de Joaquin Sorolla y Bastida (1863-1923).
Le premier représente une Petite fille jouant du tambour (1837) en suivant la tradition espagnole: cadre doux, élégant, inspiré de la mode anglaise (robe à smocks, visage modelé par la lumière, grands yeux bleus peu typiques du caractère hispanique!). Ce portrait formel contraste avec la spontanéité, la vitalité, des scènes de jeux d’enfant dans la mer de Sorolla. Peintre de la lumière et du plein air, Sorolla se défend d’être assimilé aux Impressionnistes en raison de son approche technique différente: son trait de pinceau est plus vif, plus haché.
Une modernité qui est évoquée dans la collection Pérez Simon par Juan Gris (1887-1927), qui, au lieu de décomposer les formes comme le font les cubistes analytiques tel Picasso, les suggère à partir d’une forme abstraite. Dans Cuillère et bol (1918), on devine un bol gris, le courbe du manche d’une cuillère en bois, le contour géométrique de trois livres et la ligne droite d’une pipe posée sur un journal.
Joan Miro (1893-1983), lui, suggère les formes par symboles. Dans l’onirique Femmes devant la lune (1944), il représente les corps féminins par une jupe triangulaire, de longs bras, un visage rectangulaire.
Dali, bien sûr, contribue à l’émergence du surréalisme.
Dernier en date dans la lignée des post-modernistes, Antoni Tapiès (né en 1923) développe un art informel qui s’appuie sur l’étude de la matière et l’incorporation de matériaux dans ses toiles. Grand Papier gris avec un symbole blanc (1965) révèle des coups de pinceaux rapides, dans une palette grisonnante, avec au centre un mystérieux signe géométrique de couleur blanche.
Le choix pour cette exposition d’une approche thématique et non chronologique est d’autant plus intéressant qu’il offre un aspect pédagogique sans lourdeur. Il permet de révéler une collection telle que la voit son propriétaire, pour le plaisir visuel, avant celui de la cote des oeuvres. Le visiteur ressent une réelle sublimation esthétique, dans la confrontation des scènes et des couleurs ainsi proposée.
A noter: Un audioguide est remis gratuitement à chaque visiteur. Il est également téléchargeable au format mp3 (application iPhone).