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Le réalisme japonais vs américain

Beautés divines – Peinture traditionnelle japonaise nihon-ga de MORITA Rieko
Jusqu’au 18 juillet 2009
Espace des Arts Mitsukoshi-Etoile, 3, rue de Tilsit 75008, 6€

La civilisation perdue – George CONDO
Jusqu’au 17 août 2009
[fnac:http://plateforme.fnacspectacles.com/place-spectacle/manifestation/Exposition-GEORGE-CONDO-CONDO.htm]
Musée Maillol, 61, rue de Grenelle 75007, 8€

Réalisme d’après nature d’un côté, réalisme fantaisiste poussant jusqu’à la caricature de l’autre. L’oeuvre de MORITA Rieko à l’Espace Mitsukoshi-Etoile et celle de George Condo au musée Maillol éclairent la notion de réalisme pictural, au-delà de la tradition européenne. Voyage esthétique de part et d’autre des frontières hexagonales.

BEAUTES DIVINES

Originaire de Kobé, R. Morita s’installe à Kyoto, capitale culturelle du Japon, après des études à l’Université des Beaux-Arts. La jeune femme y étudie la peinture traditionnelle nihon-ga – peinture décorative d’après nature (contrairement à celle de Tokyo, plus conceptuelle), réalisée sur des panneaux en bois. Ce type de peinture est apparu à Kyoto au XVIIIe siècle sous MARUYAMA Okyô (1733-1795) et est toujours d’actualité.

Dans la peinture nihon-ga, le peintre crée lui-même ses couleurs en broyant des pigments minéraux (iwa-enogu), une feuille d’or ou du carbonate de calcium issu de coquillages (gofun). Il mélange l’ensemble avec de la colle animale (nikawa). Le dosage personnel permet à chaque artiste de différencier sa palette. Celle de R. Morita est éclatante de couleurs pour traduire l’irradation de la nature.

L’exposition présente les portes coulissantes (fusuma) et le plafond de la résidence du moine supérieur (hôjô) attenant au Pavillon d’or (Rokuon-ji) de Kyoto, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, réalisés par Rieko Morita en 2007. Ces portes, composées de huit panneaux de bois (cyprès) agencés par paire, illustrent les quatre saisons. Pivoines pour le printemps, iris d’eau pour l’été, chrysanthèmes pour l’automne et camélias pour l’hiver. Fidèle à la tradition japonaise, l’artiste privilégie la représentation de la nature sur celle de l’homme, qui n’est qu’une infime partie de l’univers. Ce dernier se manifeste de manière plus généreuse à travers la faune et surtout la flore. Une vision que l’on retrouve dans le shintoïsme et le bouddhisme.

Si R. Morita se distingue dans  la peinture traditionnelle de fleurs et d’oiseaux (kachô-ga), elle sait également capter la beauté des personnages (jimbutsu-ga), notamment celle de jeunes femmes souriantes. Quatre types de femmes sont récurrents dans son oeuvre: la Chinoise, l’apprenti-geisha de Kyoto (dite maiko), la femme d’Asie du Sud-Est (cf. Danseuses de Bali) et la femme contemporaine, au trait plus occidental que japonais. Elles peuvent s’inscrivent dans un décor ultra moderne comme cette femme assise à l’extrêmité d’un canapé, l’étendue de la vue derrière elle donnant sur une baie éclairée des lumières électriques de la ville (cf. Lumières sur la baie, 1996).

LA CIVILISATION PERDUE

George Condo (né en 1957 dans le New Hampshire, Etats-Unis) émerge sur la scène new-yorkaise en même temps que Jean-Michel Basquiat et Keith Haring, tous deux déjà exposés au musée Maillol.

La peinture de G. Condo se caractérise par sa synthèse des mouvements picturaux occidentaux. L’artiste mêle dans une même toile le cubisme, l’expressionnisme abstrait, le classicisme et les dessins de cartoon! Condensé de l’histoire de l’art, son oeuvre pastiche aussi bien des modèles classiques (par exemple, les personnages du Déjeuner sur l’herbe de Manet) que contemporains (tels H. et B. Clinton lors d’un congrès). A son sujet, Félix Guattari (1930-1992) écrit en 19990 « […] Vous croyez reconnaître un Rembrandt ou un Matisse mais la référence demeure floue, oscillante, troublante ».

Pour le musée Maillol, l’artiste s’est imprégné de la crise financière actuelle qui a bouleversé les esprits américains pour à la fois exprimer ses fantasmes intérieurs (à travers le personnage récurrent de Rodigo, dixit G. Condo) et son cynisme par rapport à l’ultra-libéralisme (cf. la figure de Fanny Mae qui est aussi le nom phonétique de la Federal National Mortgage Association, ruinée depuis la crise des subprimes).

Une oeuvre originale, assurément décoiffante. A noter, la plupart des tableaux présentent des scènes scabreuses et peuvent choquer les enfants.

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