Quand la mode rencontre la danse

Portrait de Jean Paul Gaultier et Régine Chopinot, Le Défilé, 1985 - (c) Jean-François BauretJean Paul Gaultier / Régine Chopinot, Le Défilé

Jusqu’au 23 septembre 2007

Musée des Arts Décoratifs, 107 rue de Rivoli 75001, 01 44 55 57 50, 8€

Paroxysme de la collaboration entre le couturier Jean Paul Gaultier et la chorégraphe Régine Chopinot, Le Défilé (1985) mélange les genres, investit de nouveaux territoires tant dans le domaine de la mode que celui de la danse contemporaine, sur une musique envahissante.


Tenue de danseuse, Le Défilé, passage 'la bosse de la danse', 1985, Les Arts Décoratifs, musée de la Mode et du Textile, 2006 - (c) Jean Tholance L’ensemble des costumes restaurés des différentes pièces chorégraphiques associant les deux « enfants terribles » de la scène parisienne fait aujourd’hui l’objet d’une donation – et d’une exposition – au musée de la Mode et du Textile, par Régine Chopinot et le Centre Chorégraphique de la Rochelle.

Quatre-vingts silhouettes (environ 308 vêtements et accessoires) illustrent l’insolence créatrice de Régine Chopinot (née en 1952, en Algérie) et de Jean Paul Gaultier (né en 1952, en région parisienne). La première aime « détourner la tradition académique au profit de sa fantaisie et des modes de l’air du temps », commente Olivier Saillard, responsable de la programmation aux Arts décoratifs-musée de la Mode et du Textile. Tandis que le second fonde sa carrière sur la provocation avec, comme premier succès, le jupon de tulle, sous un tutu moderne, réhaussé d’un blouson de cuir noir (collection de Prêt à Porter de 1976)… »Si l’on a tellement parlé de lui, c’est surtout parce qu’il a introduit une forme d’irrespect dans le monde parisien de la mode, qui a généralement tendance à se prendre au sérieux », analyse la journaliste belge, Agnès Goyvaerts.

Le Défilé, 1985 - (c) JulesDes Délices (1983) à Soli-Bach (1994), la collaboration joyeuse entre Chopinot et GaultierLe Défilé, 1985 - (c) Jules comptabilise quatorze pièces, dont la plus célèbre reste Le Défilé (1985).

Ce mi-ballet mi-défilé a été spécialement orchestré pour quatorze danseurs, deux comédiens et deux mannequins, chacun déambulant sur un plateau en forme de « T », comme un podium de haute couture. « Mais j’ai perverti la marche », s’amuse R. Chopinot: « mes danseurs avancent à quatre pattes, traînent leurs cavalières sur un pied, se dandinent… Jean Paul Gaultier fait des croquis, moi je fais des caricatures ».

Le Défilé met en scène des costumes surprenants qui reprennent les codes des défilés de mode de J. P. Gaultier. Mais ici, le costume, décliné en quatorze thème, est utilisé selon ses qualités purement chorégraphiques. Citons les robes corsets (collection printemps-été 1983) – immortalisées sur scène par Rita Mitsouko puis Madonna -, qui sur le thème du « manque d’air », étouffent le corps des danseurs. Ou les robes crinolines (thème des « cris-nolines »), composées de pulls extra larges, façon Shetland torsadé, dans lesquels les danseuses s’agitent sur des pitreries organisées. Les robesTenue de danseur, Le Défilé, passage 'les coussins', 1985, Les Arts Décoratifs, musée de la Mode et du Textile, 2006 - (c) Jean Tholance coussins, réalisées à partir de vrais coussins en satin rouge, vert, ou moutarde, du plus petit format à l’édredon, sont chargées de remplacer le traditionnel tutu. Les costumes puzzles, aux couleurs vives qui s’emboîtent les Tenue de danseur, Façade en divertissement, 1993, Les Arts Décoratifs, musée de la Mode et du Textile, 2006 - (c) Jean Tholanceuns les autres, visent à créer un effet burlesque. Sans oublier la légendaire marinière androgyne, éternellement portée par le couturier lui-même. Les accessoires jouent également un rôle important avec le sac Kelly surdimensionné – clin d’oeil coquin à Hermès -, ou les ombrelles géantes qui disparaissent sous le poids de bas et collants de soie, d’une gamme de couleur chair, ocre, rose à un dégradé de marron pour restituer les étapes du bronzage.

Tenue de danseuse, Le Défilé, passage 'la bosse de la danse', 1985, Les Arts Décoratifs, musée de la Mode et du Textile, 2006 - (c) Jean TholanceBeaucoup d’humour et d’imagination, donc, pour cette exposition-défilé-spectacle, qui met en avant des costumes destinés à être vus et non achetés. Une mode qui montre les dessous portés dessus et vice versa, et qui remet au goût du jour – au grand dam des féministes des années 1960! – les gaines de grand-mère. »Un défilé anti-défilé en quelque sorte, résume malicieusement Régine Chopinot.

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