La poterie berbère: un art féminin qui remonte à la préhistoire

Pot à deux anses, col et épaules décorés - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesIdeqqi: Art de femmes berbères

Jusqu’au 16 septembre 2007

Musée du quai Branly, Galerie suspendue Est, 206 et 218 rue de l’Université ou 27, 37, 51 quai Branly 75007, 01 56 61 70 00, 8,50€

Le musée du quai Branly propose une exposition dossier remarquable, orchestrée par la spécialiste du Maghreb, Marie-France Vivier, sur l’ideqqi – terme berbère qui signifie poterie. Réalisé par les femmes dans les villages depuis la préhistoire, cet art authentique tend aujourd »hui à se perdre. D’où l’importance de faire connaître au public occidental les codes d’un savoir-faire ancestral en voie de disparition.

Lampe à huile à godet en terre cuite provenant de Kabylie - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesL’exode rural et le développement d’une économie globale qui étouffe l’artisanat local met en danger la transmission de la fabrication à la main des jarrres, couscoussiers, vases, lampes à huile, objets de cérémonie de mariage, etc. Des objets usuels qui ont une finalité effective et, à un moindre degré, une fonction décorative.

Le processus de fabrication de cette poterie utilitaire suit le procédé du colombin. Celui-ci s’obtient à partir de l’argile, matière première qui se trouve en abondance près des villages. L’argile est roulée sur une surface absorbante telle que le bois, avec la pression des mains, dans un mouvement de va et vient. Les colombins sont ensuite empilés les uns sur les autres pour former les parois du pot. Ils sont polis avec un galet ou un coquillage. La pièce est mise à sécher à l’air – au printemps, lorsque la température est douce et pas trop chaude pour éviter les craquelures – avant d’être enduite d’un engobe blanc [revêtement mince à base d’argile délayée] ou ocre. L’ensemble est décoré à la main ou à l’aide d’un pinceau rudimentaire, trempé dans des colorants naturels (blancs, ocre, et brun). La cuisson se fait au feu de bois, à même le sol. Enfin, la poterie ideqqi est parfois recouverte d’une résine végétale pour lui assurer une certaine étanchéité et lui donner du brillant.

Plat en terre cuite à décor géométrique provenant de la tribu Aït Smail en Grande Kabylie - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesLes couleurs choisies révèlent la région de production de la poterie. Le noir et le rouge sont usités en grande Kabylie et le blanc en petite Kabylie. Idem pour les motifs qui indiquent l’appartenance à telle ou telle tribu.

Jarre dite Tekelilt à décor géométrique provenant de la région d'Aït Yenni près de Tzi-Ouzon en Kabylie - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesLa poterie berbère est décorée de symboles géométriques, zoomorphes et anthropomorphes, qui évoquent ceux des tatouages et des bijoux. Telle une femme, la poterie est « parée » de symboles qui vont protéger son propriétaire contre les mauvais esprits et lui assurer amour des siens et fertilité.

« Malgré l’invasion des arabes au VIIe siècle, les Berbères ont gardé leurs croyances animistes et appliquent une version personnalisée de l’Islam », commente Marie-France Vivier, commissaire de l’exposition – sa dernière car elle part à la retraite, confie-t-elle émue! Si les motifs des serpents, des papillons, scorpions, mouches, oiseaux, etc., et les figures géométriques (carrés, rectangles, croix, triangles, losanges) se retrouvent encore aujourd’hui, de nouveaux symboles sont apparus liés à la vie moderne comme les avions et les automobiles.

Jarre à décor géométrique en terre cuite de la région d'Aït Aïssi, Algérie - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesLes objets fabriqués, puisque destinés à conserver de la nourriture ou allumer une pièce, restent au sein d’une famille. De ce fait, ils ne portent que très rarement le nom de leur créatrice. La femme ne peut vendre ses objets seulement lorsqu’elle devient veuve et désargentée.

Jatte en terre cuite réalisée par Fatma Ben Bou Soura du village Ouled Farès, Algérie  - (c) musée du quai Branly / Photo: Patrick GriesUne exposition magnifique qui se décompose en trois parties: les formes et les fonctions, les objets de la cérémonie du mariage, et les quelques objets réalisés par des femmes artistes, reconnues en tant que telles. Synthétique, soigneusement agencée, Ideqqi: Art de femmes berbères est une exposition à la fois historique et ancrée dans la contemporanéité. En un mot, passionnante.

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3 réponses à La poterie berbère: un art féminin qui remonte à la préhistoire

  1. saci dit :

    je trouve que c’est un art assez beau a regarder, il permet de retracer l’histoir de tout un peuple et de toute une région, surtout que aucune machine ou trace industrielle n’est utilisé lors de sa mise en oeuvre. je pense que la préservation de ce type d’art et l’encouragement des generations présente a reprendre le flombeau, serai une preuve du respect des principes du développement durable, a savoir notre devoir et résponsabilité de léguer nos biens et savoirs faire pour les generations futures.

  2. fraise dit :

    j’ai beaucoup aimé la poterie berbère, puisque c’est un art authentique dont je ne connaissais vraiment rien, mais aujourd’hui je suis fière de connaitre cette culture
    et de connaitre les codes d’un savoir-faire traditionnel, qui tend à se perdre,
    d’ici l’importance de sensibiliser les berbères, ainsi que tout le peuple marocain
    de mieux s’intérresser à cet art, parce-qu’il représente l’une des principaux colonnes de la civilisation berbère .

  3. Loumis dit :

    Nous avons decider de faire vivre cette culture mieux que par des paroles ,je vous propose de retrouver cet artisanat sur notre site :www.massinissa-artisanat.com

    Merci

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