Jean-Jacques Henner ou le dernier des Romantiques

Jean-Jacques HENNER, La femme qui lit, dit La Liseuse, 1883. Toile sensuelle au modelé à la Corrège, ayant appartenu au grand collectionneur Alfred Chauchard qui possédait aussi l'Angélus de Millet. Huile sur toile, 94 x 123 cm, Musée d'Orsay - (c) RMN, Photo: Hervé LewandowskiFace à l’Impressionnisme, Jean-Jacques Henner

Jusqu’au 13 janvier 2008

Musée de la Vie romantique, hôtel Scheffer-Renan, 16 rue Chaptal 75009, 01 55 31 95 67, 7€

Le musée de la Vie romantique présente une exposition sur Jean-Jacques Henner, un peintre du XIXe siècle, célèbre à son époque mais tombé dans l’oubli depuis. Une belle occasion de découvrir son oeuvre singulière, autant emprunte de réalisme que d’une grande spiritualité.

Jean-Jacques Henner (1829-1905) était le contemporain de Degas, Manet, Degas, Monet, Pissaro, Renoir, Fantin-Latour, Bazille, etc., bref toute la clique des Impressionnistes, qui eux sont restés dans les annales de l’histoire de l’art.

Jean-Jacques HENNER, La Magdeleine, entre 1878. Etude ou réplique du tableau du salon de 1878. Scène de repentance dans la grotte. 'Un ouvrage exquis...c'est de la chair, c'est de la vie...'(Castagnary). Huile sur bois, 27 x 21 cm, Musée Jean-Jacques Henner - (c) RMN, Photo: Franck RauxC’est que son art dérange. D’une part parce que ses compositions, ultra simples, se focalisent sur un sujet biblique tels sa Madeleine (1878) ou l’étonnant et poignant Jésus au tombeau (1879) – rien qu’une méditation sur la mort!
D’autre part parce que le style de Henner mêle réalisme et sfumato (effet vaporeux obtenu par superpositions de couches légères de manière à rendre les contours du sujet imprécis, comme enveloppé de fumée). Une Jean-Jacques HENNER, Rêverie, vers 1904-1905. Oeuvre ultime, restée inachevée. On y retrouve les contrastes entre les tonalités de bleus, de bruns, verts et rouges, chères au peintre. Huile sur toile, 110 x 70 cm - (c) Musée du Petit Palais / Roger-Viollettechnique mise au point par Léonard de Vinci, qui confère au sujet une part de mystère, surtout lorsque celui-ci se trouve être (cf. Rêverie, vers 1904/5) une femme à la douceur virgilienne, contredite par une chevelure rousse éclatante et à la peau nacrée, souvent représentée nue, comme un appel à la tentation. Figure d’ange ou de démon?

Pourtant, Jean-Jacques Henner – issu d’une famille de cultivateurs alsaciens – a connu les honneurs en son temps. Non seulement il reçut de nombreuses distinctions dont le sésame de l’époque – le Grand Prix de Rome (1858) pour Adam et Eve retrouvant le corps d’Abel – qui lui ouvre les portes de la Villa Médicis (1859-64). Voyage italianisant dont il revient changé, les peintres de la Renaissance italienne exerçant une grande influence sur son oeuvre, notamment Caravage et Raphaël, puis Titien et Corrège (cf. La Descente de croix). Henner devient également Grand Officier de la Légion d’Honneur (1903).

Surtout, il est reconnu par ses pairs, qu’il cotôie au Café Guerbois, au 9-11 Grande rue des Batignoles (aujourd’hui, 9 avenue de Clichy), consacré temple de la vie moderne par Manet. Et par les collectionneurs privés, telle Madame Charles Kestner qui lui commande L’Alsace. Elle attend (1871). Une oeuvre qui devient le symbole de la perte de l’Alsace et de sa résistance républicaine face à l’Empire prussien, et que la généreuse mécène offre à Léon Gambetta – farouche opposant au traité après la guerre de 1870.
Jean-Jacques HENNER, Autoportrait, après 1877. Réplique de celui du musée des Offices de Florence. Henner porte sa légion d'honneur obtenue en 1873, il fait inscrire: Ecole française, J.-J. Henner, peintre alsacien. Huile sur toile, 46,4 x 38,5 cm. Musée Jean-Jacques Henner - (c) RMN/Photo: Franck Raux De même que l’Etat français (cf. La Chaste Suzanne, 1864, ou Saint Sébastien, 1888, tous deux achetés pour le musée du Luxembourg) ou les institutions culturelles étrangères (cf. son Autoprotrait acheté par le musée des Offices de Florence ou l’esquisse de Rebecca, vers 1903/5, sans doute pour le musée de San Francisco) lui commande/achète de nombreuses oeuvres. Ce qui fait de lui – selon ses détracteurs – un peintre officiel, « académique », qui manque d’imagination et dont ils critiquent les couleurs sombres. « Son imagination est vide; il ne sait point composer; il n’a d’autre sentiment que celui de la tache et du trou » (Louis de Fourcaud, 1889).

Jean-Jacques HENNER, Femme couchée dite La Femme au divan noir, 1869. Oeuvre louée par Zola, soutient la comparaison avec les nus de Courbet, Manet et Renoir de la même période. Elle est précédée de La Toilette, exposée au Salon de 1868, tant critiquée qu'Henner la détruit. Manet la considérait pourtant comme son meilleur tableau. Huile sur toile, 93 x 180 cm - (c) Musée des Beaux-Arts de Mulhouse, Collection Société Industrielle de Mulhouse, Photo: C. Kemps Position que Rodolphe Rapetti, conservateur général du Patrimoine et Directeur du musée national Jean-Jacques Henner (qui rouvrira ses portes à l’automne 2008, après six années de travaux de rénovation), entend contredire par cette brillante exposition.

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